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Femme du monde, femme hors du monde ?

S’il est un sujet qui passionne, c’est bien celui de la femme et plus précisément, celui des rapports entre hommes et femmes. Suite à la dernière péripétie, c’est à dire, la volonté de la Ministre des Droits de la Femme, Najat Vallaud-Belkacem, de pénaliser les femmes au foyer, une réaction est justifiée. La mesure aurait pour but de favoriser le travail des femmes et de changer les mœurs. Aujourd’hui, la femme garde bien souvent son statut de mère qui se heurte à celui de travailleuse. Une journée de travail ordinaire commence à 7h30, où l’on arrive vers 9h, pour prendre une heure de pause à midi, puis finir à 17h, ce qui est tout à fait incompatible avec la dernière réforme du rythme scolaire dirigée par Vincent Peillon (la demi-journée ajoutée ôtant une heure de classe par jour, les enfants vont soit avoir une pause déjeuner de trois heures, soit quitter l’école à 15h30). Au vu de ces horaires, il est tout à fait impossible qu’une mère puisse à la fois travailler et s’occuper de ses enfants.

Une première difficulté est relevée. La femme qui travaille ne peut pas, sauf aménagements particuliers, s’occuper autant de ses enfants que celle qui ne travaille pas. L’idée d’écourter le congé parental ou encore celle consistant à pénaliser fiscalement les foyers les ménages mono-actifs est liée au désir exprimé courant 2013 de pouvoir « arracher les enfants aux parents ». Si cette déclaration faite devant l’Assemblée Nationale visait les écoles, il est tout à fait juste de voir un lien entre ces mesures. Si la femme travaille et ne dispose plus du temps nécessaire à l’éducation des enfants, ces derniers sont éduqués uniquement par l’école, bien souvent laïque, et, quand les familles en ont la possibilité, par une nourrice. Il est alors aisé de propager une éducation malsaine, mais aussi des pratiques qui se heurteraient à celles des parents.

Néanmoins, le travail des femmes soulève une autre difficulté, bien plus ancrée, celle du statut de la femme et de son rôle au cœur de la société. Les féministes n’ont cessé de vouloir transformer la femme en homme. Les « révolutions féministes » ont rapproché la femme de l’homme. Par le vote, le travail, la possibilité de toucher et gérer une paie sans avis de l’époux, la femme acquerrait sa liberté. Hors du foyer se situerait son salut, en activité, tout comme son époux.

La vision féministe de la femme est, de façon optimiste, bien triste. La femme n’existe que si elle devient un double de l’homme, alors que le poète la désigne comme « l’avenir de l’homme ». La femme que critiquent les féministes, cette femme « soumise à son époux » par la fides engendrée par le mariage, première entre toutes, est-elle si faible ? Ne peut-on pas, au contraire, penser que la femme perd sa liberté et sa condition en devenant « l’égal », et donc l’imitation, de l’homme ?

L’image de la femme « soumise » est celle d’une première Didon, qui chérie la « fides  », promesse faite au défunt mari de ne jamais, même au-delà de la mort, se lier à un autre homme.

« Ille meos, primus qui me sibi iunxit, amores
abstulit ; ille habeat secum seruetque sepulchro.
 » [1]

Or, comme chacun le sait, c’est parce que Didon subit une confrontation entre le statut de femme, d’épouse fidèle et celui de Reine qu’elle choisit le suicide, préservant l’honneur de son pays. Alors qu’elle pouvait suivre Énée et qu’un choix s’imposait, le sien consista à rester et mourir. Ce n’est pas tant la passion qui entraine la chute que l’opposition entre devoir et vie privée.

Au delà de la notion même d’honneur que la femme doit préserver afin de la transmettre aux générations futures, la femme possède une image de vertu et de stabilité. C’est Lucrèce qui se suicide après le viol de Sextus Tarquin. La femme fidèle et vertueuse est avant tout la mère qui transmet ces valeurs à ses propres enfants et qui gagne ainsi le respect de ceux qui l’entourent. La figure de la mère rappelle celle des déesses mères présentes dans toute religion autour du bassin méditerranéen, ce qui nous montre qu’il ne s’agit pas d’un fait de société, mais d’une réalité anthropologique. Parmi les plus célèbres se trouvent Isis, ou encore Cérès (Déméter pour les Grecs), qui part à la recherche de sa fille Proserpine, enlevée par Hadès (frère de Déméter et oncle de Proserpine). La mère prend en charge l’enfant, se désespère de son absence et part à sa recherche en parcourant le monde. Elle condamne à mort les hommes par l’absence de fertilité de la terre et fait ainsi fléchir les dieux. Il n’est, ici, nulle faiblesse de la mère.

Plusieurs siècles plus tard, en 1617, l’assassinat de Concino Concini, événement marquant de la vie de Louis XIII, marque à nouveau l’importance de la mère. En effet, Concini est le favori de Marie de Médicis, régente et mère qui n’accorde qu’une faible place au Roi, son fils. La prise de pouvoir du Roi ne peut réellement s’accomplir qu’en devenant homme et donc, en montrant que son éducation est achevée. La mère peut alors céder sa place, comme ce fut le cas en 1661, lorsque Louis XIV accède réellement au trône.

D’aucune façon, à la vue de ces exemples, la maternité ne vient transformer la femme en être faible. Elle est une maitresse de foyer et dirige donc la famille par l’éducation des jeunes enfants. Le respect de la femme est lié non seulement à sa condition, mais aussi au rôle qu’elle joue dans la société par l’enseignement qu’elle transmet.
Le lien du mariage, qu’il soit sacré ou purement matériel, est une institution qui vise à fonder un foyer, et donc une famille. Au cœur de cette famille se situe le couple parental, et, au cœur de ce couple, chacun doit rester à sa place. Le monde est ainsi fait depuis toujours, il en sera de même si chacun prend les dispositions nécessaires.

Les propositions de Najat Vallaud-Belkacem évoquent l’égalité, un mot qui, à ce jour, semble avoir perdu son sens. Il ne suffit de se dire « égaux » pour l’être réellement, et rechercher à tout prix une égalité en tout point ne montre qu’un désir d’uniformiser. Uniformiser les esprits tout d’abord, par une formation et des propagandes diffusées par le gouvernement, mais uniformiser les corps également, en adaptant chacun à tout type de travail. En effet, accorder aux femmes les mêmes actions que les hommes, chercher à obtenir un équilibre statistique : comment ne pas voir, à nouveau, la volonté de renier toute différence entre les hommes et les femmes ?

En effet, il semble aujourd’hui impossible de lier le travail des femmes à une forme d’émancipation ou de liberté de la femme qui lui soit positive. Le travail des femmes est ancien. Chaque roman présente les lavandières ou nourrices, mais on voit également, avec l’industrialisation, les ouvrières. Ces femmes n’ont, comme le rappelle Françoise Battagliola au cœur de son Histoire du travail des femmes, aucun plaisir et aucune satisfaction à travailler. Elles travaillent pour survivre. La femme exècre le travail jusqu’à la première guerre mondiale au cœur de laquelle une propagande vise à mettre en valeur l’activité des femmes.

Cependant, considérer qu’une femme au foyer est sans occupation serait une terrible erreur. Le foyer est un lieu de travail, et il est celui de la femme. Si certains sont petits et peuvent laisser place à une activité extérieure, d’autres ne peuvent que réclamer une présence forte pour maintenir une organisation stable, entre parfois des employés, des enfants, des comptes à gérer… La femme « au foyer » est donc celle qui gère le foyer. Elle est présente et connaît précisément chaque employé. Elle participe à l’éducation des enfants. Elle tient le cahier de comptes du foyer. Voilà trois premières activités auxquelles peuvent s’ajouter d’autres, comme le bénévolat ou un travail, je pense, à temps partiel. Je vois déjà les critiques fuser. Et l’homme ? N’est-il pas le grand absent du foyer ? Mesdemoiselles, mesdames, voici ma réponse : auparavant, vous étiez libres de tenir votre maison selon vos propres choix, de sortir rencontrer vos amis, faire du bénévolat ou travailler quelques heures. Mais, une fois que les taches domestiques sont partagées, ce n’est plus à vous de choisir, c’est un choix commun qui, aujourd’hui, vous échappe de plus en plus. Quelle liberté avez-vous gagnée en travaillant ? Celle de travailler. Qu’avez-vous perdu ? La légitimité de vos choix quant au foyer.

Il me sera alors dit que le partage des taches est à la base du mariage. Je pourrai répondre que c’est faux, puisqu’il s’agit de la famille, mais je me contenterai de rappeler qu’à vouloir tout diviser, il ne reste rien. L’union du couple ne se révèle pas grâce au nombre de couches changées par chacun mais par un bien-être et un respect mutuel lié à une légitimité de l’action de l’un ou l’autre.

De plus, si l’absence d’un parent est cruelle, que dire de celle des deux parents ? Comment se sentir mère quand on ne peut s’occuper activement de son enfant ? Ce n’est pas la liberté que Najat Vallaud-Belkacem propose, mais la mutation en homme de la femme qui doit alors perdre son statut de mère et de protectrice du foyer. Si la femme devient un double de l’homme, quel statut lui accorder au sein de la société ? Faire entrer la femme dans le monde n’est-il pas le chemin qui mène à l’inexistence de la femme ? Les féministes à l’image de N. Vallaud-Belkacem n’ont aucune idée de leurs actes, mais il nous faut encore espérer que c’est le cas, car tout cela est tout à fait inquiétant. La destruction des foyers a débuté et elle est visible dans chaque domaine. Il nous faudra donc, mesdemoiselles, mesdames, messieurs, nous tenir informés et, comme toujours, prêts à réagir.

Marie P.
R&N Mademoiselle


[1« Lui qui, le premier, m’a unie à lui, emporta mes amours ; qu’ils les détiennent auprès de lui et les conservent en son tombeau. » Virgile, Énéide, IV, 28-29

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