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Converti au catholicisme, Serge Abad-Gallardo témoignait dans son précédent livre (J’ai frappé à la porte du Temple, Téqui, 2014) sous-titré « Parcours d’un franc-maçon en crise spirituelle » de ces années que l’auteur a passé dans la franc-maçonnerie.
Le but de ce nouvel ouvrage est assez différent du premier : partant de nombreux documents maçonniques, l’auteur analyse le système métaphysique de la franc-maçonnerie et ses dogmes pour aboutir à la conclusion que celle-ci est une religion luciférienne même si nombre des initiés n’en ont pas conscience. L’auteur nous montre aussi combien la doctrine de l’Église est éloignée de l’initiation maçonnique et combien sa condamnation de celle-ci n’a pas perdu de sa pertinence.
L’influence politique de la franc-maçonnerie est de notoriété publique. L’auteur rappelle ainsi par exemple que « la Grande Loge féminine de France dispose même d’une représentation officielle auprès des instances politiques européennes, l‘Institut maçonnique européen de la GLFF » [2]. On ajoutera que cet institut est au Parlement européen membre permanent de la Plateforme pour la Laïcité en Politique (sic) et membre de son Conseil consultatif [3].
Plutôt que de faire de longues listes de personnalités membres des différentes loges, l’auteur analyse le rôle de la franc-maçonnerie dans l’origine de toutes les lois sociétales de ces cinquante dernières années : le divorce, l’avortement, la loi sur le mariage homosexuel… De par leurs conséquences morales et sociales, ces évolutions sociétales sont l’un des piliers de l’action de la franc-maçonnerie. « Chaque année, les francs-maçons du Droit humain se voient soumettre, par leurs instances nationales, une question sociale à débattre. [..] Ce rapport global fait l’objet ensuite d’une transmission au chef de l’État » [4].
Membre de l’aumônerie d’un hôpital depuis désormais plusieurs années, l’auteur accompagne les mourants dans leurs derniers instants. Cette expérience personnelle est à l’opposée de ce que relatent et prônent nombre de propositions de lois et de rapports que publient ceux qui souhaitent rendre l’euthanasie légale en France. Cette expérience personnelle de l’accompagnement des personnes en fin de vie et le fait que ce sujet soit désormais le cheval de bataille sociétal des progressiste expliquent la place que l’auteur accorde à l’euthanasie dans le projet de la franc-maçonnerie. Citant largement des documents maçonniques, il montre au lecteur l’influence de la franc-maçonnerie dans les récents débats [5] et notamment sur la notion de « sédation profonde ».
L’analyse des symboles ésotériques utilisés par la franc-maçonnerie occupe une large part de l’ouvrage et met en lumière son caractère profondément luciférien. Les évocations explicites de Lucifer dans un certains nombre de rituels et les symboles maçonniques qui y font implicitement référence ont en commun de réaliser une « inversion des rôles de Dieu et du diable » [6]. Car, comme le montre l’auteur, le système métaphysique maçonnique est un dithéisme assez proche de la doctrine manichéenne : il existe deux principes, Dieu et Lucifer, comme deux facettes d’une même réalité suprême. Dans cette représentation maçonnique, Lucifer est toujours le porte-lumière, il n’a jamais chuté et Dieu est considéré comme le responsable du mal.
Si la franc-maçonnerie cite parfois la Bible, elle regroupe en réalité des enseignements issus de nombreuses sources (gnosticisme, pythagorisme, kabbale, Zodiaque…). Les éléments tirés de la Bible sont par ailleurs systématiquement détournés de leur signification initiale. Les lettres INRI sont par exemple détournées de leur signification biblique (« Iesus Nazarenus Rex Iudaeorum ») pour aboutir à une signification maçonnique (« Igne Natura Renovatur Integra ») ; Saint Jean est identifié au dieu latin Janus à partir d’une étymologie erronée ; l’eucharistie est caricaturée dans un rituel maçonnique à l’occasion duquel est évoqué Lucifer [7]. De même, reprenant le rituel d’initiation de la loge Droit humain, l’auteur montre que ce rituel dans lequel le profane considéré comme « dans les ténèbres » veut être admis car il cherche la lumière est un rituel religieux qui n’est pas sans rappeler le rituel du baptême auquel il s’oppose. La franc-maçonnerie est en fait ici une religion comme une autre, mais sans révélation, et surtout dès son initiation elle est antichrétienne.
C’est donc en tout logique que l’un des buts et des conséquences de la franc-maçonnerie est de « détruire la morale et les références sociales de l’Eglise catholique afin d’imposer une morale et des références relatives, contingentes, fluctuantes, construites et non pas révélées, ainsi remplacées par un modèle maçonnique » [8].
Ce relativisme moral s’accompagne d’autres conséquences extrêmement profondes : il n’y pas de spiritualité maçonnique, celle-ci n’est qu’une certaine intellectualité à laquelle manque la ferveur de l’oraison. C’est là une différence fondamentale que souligne l’auteur : la foi est une rencontre, pas une équation. « Mais cela, la méthode maçonnique ou l’enseignement ne permettent jamais de l’atteindre » [9].
Une autre profonde différence entre la franc-maçonnerie et l’Église est la simplicité de cette dernière : il est infiniment simple de rentrer dans une église et de prier. « Le Seigneur n’est pas formaliste ! » écrit l’auteur. L’Église est ouverte à tous, elle n’en filtre pas l’entrée, tout le monde est le bienvenu et sa doctrine n’est pas cachée, réservée à quelques initiés, mais accessible à chacun. La franc-maçonnerie dépasse par ailleurs sur ce point les vieilles hérésies gnostiques auxquelles l’Église a dû faire face. Car si les gnostiques avaient déjà cette conception de savoir réservé aux initiés qui seul conduit à être sauvés, il n’existe en revanche aucune eschatologie maçonnique.
Comme l’explique lui-même l’auteur, le but de l’ouvrage n’est pas de stigmatiser les francs-maçons dans leur ensemble. Il distingue trois catégories de francs-maçons : ceux qui sont uniquement là par arrivisme et dont la préoccupation première est de se servir de ces réseaux pour faire carrière ; ceux qui sont là par nostalgie de la révolution française ; et ceux, qui forment le plus gros contingent, qui ont été en réalité trompés alors qu’ils cherchaient sincèrement la vérité. Si l’ouvrage s’adresse bien évidement aux chrétiens, c’est aussi à cette troisième catégorie que l’auteur souhaite s’adresser. « Les francs-maçons doivent prendre conscience que la franc-maçonnerie est l’une des ruses de Lucifer » [10].
[1] p. 158.
[2] p. 85.
[4] p.63.
[5] p.74-75.
[6] p.115.
[7] p.106.
[8] p.101.
[9] p.178.
[10] p. 137.
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