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L’année 1515 devrait évoquer pour tous les écoliers, et pour de nombreux Français, la célèbre victoire de Marignan célébrant avec éclat l’avènement du jeune François Ier. Mais cette année aura vu un autre événement d’importance, bien que caché sur le moment : la naissance de Teresa de Cepeda y Ahumada, mieux connue sous le nom de sainte Thérèse d’Ávila, réformatrice du Carmel…
Alors que la Révolution prône, encourage et mène à bien une politique de « table rase » et d’amnésie, quand de nombreux Européens sont coupés de leurs racines et ignorent l’histoire de leur nation, de leur province et de leur famille, les livres d’histoire se sont multipliés, ces dernières années, sur les rayons de nos librairies (ce qui n’est malheureusement pas le cas du « livre religieux », selon des statistiques brièvement commentées par Bruno Nougayrède, directeur du groupe Artège, récemment interrogé par Le Rouge & le Noir). Un nouveau genre semble obtenir un certain succès : la biographie historique. Après Louis XIII, Richelieu, Louis XIV, Ludendorff ou Napoléon, les biographes s’intéressent depuis quelque temps… à des saints et bienheureux – et même à Jésus, comme en avait témoigné un coup d’audace de Jean-Christian Petitfils.
L’hagiographie semble être passée de mode, comme la foi et le christianisme. Elle est dotée d’une connotation péjorative, étant trouvée « gnangnan », insipide, ridicule, frelatée. Il est bien entendu qu’il existe de la mauvaise hagiographie, comme il existe de la mauvaise théologie ou de la mauvaise philosophie. Mais, derrière ce sentiment généralisé de pusillanimité, une phobie se cache : la peur de la sainteté. Pour sûr, en un temps où nous croisons des fidèles qui seraient déçus de voir leur fils embrasser le sacerdoce ou leur fille se jeter en religion, la lecture d’un livre tel que Le Saint Curé d’Ars de l’abbé Trochu ne peut être que prohibée…
Quoi qu’il en soit, les biographies plus historiques écrites sur les saints ne doivent pas souffrir de nos préjugés. Elles doivent être soignées, relayées, étant de bons instruments d’évangélisation, et c’est pour cela que nous vous présentons aujourd’hui, 28 mars, jour anniversaire de la naissance de sainte Thérèse d’Ávila, un ouvrage écrit par Catherine Delamarre (qui a enseigné de longues années l’espagnol en classes préparatoires) et intitulé Thérèse d’Avila [1] (comme pour Le roman de Jeanne d’Arc de Philippe de Villiers, nous pouvons cependant regretter l’absence de l’adjectif « sainte »). Fort de cent cinquante-quatre courts chapitres, cet ouvrage a le mérite de nous introduire avec précision dans la vie de sainte Teresa de Jesús. Bien que Français et admirateurs de sainte Thérèse de Lisieux, n’oublions pas sa grande sœur castillane en religion.
Les Français s’enorgueillissent du rôle que leurs nations et ressortissants ont joué au sein de la Chrétienté, et c’est une saine fierté. Nous nous targuons, depuis quelques années, depuis que Jean-Paul II a repris lors d’une visite dans notre pays une expression de Lacordaire, d’être les enfants de la « fille aînée » de l’Église, titre repris au roi de France, surnommé par plusieurs papes, au cours des siècles, « fils aîné de l’Église ». La littérature du marquis de La Franquerie révèle bien cet état d’esprit français faisant de notre patrie une entité chérie de Dieu, ayant un rôle providentiel à jouer sur la face de la terre.
Nous faisons bien d’entretenir de si nobles desseins et désirs. Mais nous aurions tort de nous parer d’une exclusivité absolue. Les Espagnols pourraient eux aussi se glorifier d’une prédilection toute spéciale, ayant œuvré à une longue Reconquista contre les Maures, sous l’égide des Rois catholiques – ou « Rois très catholiques » –, et converti de nombreux Juifs, avant d’être des remparts contre la Révolution. Ils pourraient même affirmer que les désordres ont été introduits dans la péninsule par les Français, et les Espagnes unies ont mis plus de temps que la France à tomber dans une déliquescence totale, telle celle que nous contemplons tristement aujourd’hui, accélérée par les événements ecclésiaux d’il y a un demi-siècle.
Toutefois, en lisant la vie de sainte Thérèse d’Ávila, nous ne pouvons qu’être surpris de certains faits et de certaines personnalités, peu chrétiens. On comprend bien qu’il n’y a rien à défendre des exactions commises aux Amériques (sans qu’elles fussent générales), et que l’Inquisition était plus que nécessaire à dompter les peuples espagnols, vraisemblablement sauvages et retors. Il y avait beaucoup à faire, et les réformateurs ne pouvaient pas être de trop…
Nous allons vous faire lire les principaux passages de l’ouvrage de Catherine Delamarre mettant au jour une certaine cruauté impie ou une certaine incurie à l’égard de la religion.
Le bien fait bondir les démons. De nombreuses fondations de sainte Thérèse se sont heurtées à des oppositions virulentes. À Ávila, les citadins se sentaient trop pauvres pour entretenir une nouvelle communauté : ils menacèrent de procès et parlèrent de démolir le monastère.
Nous comprenons que des païens, dans les premiers siècles, et même après (Japon), aient pu se montrer cruels et infliger bien des persécutions aux chrétiens. Mais cela est intolérable quand la persécution vient de personnes relevant de l’état clérical. Teresa eut fort à faire contre les carmélites molles et tièdes qui prônaient coûte que coûte la règle relâchée : « Les Mitigés la chargeaient de tous les péchés. Ils voyaient en elle une femme aventureuse, inquieta y andariega, agitée et vagabonde, qui prêchait la clôture tout en multipliant les voyages [2]. »
Ce n’est pas d’aujourd’hui que la sainteté dérange. Mais un traitement bien pire, inhumain, diabolique, attendait saint Jean de la Croix :
« Au milieu de la nuit du 4 décembre 1577, des officiers de justice enlevèrent sauvagement Jean de la Croix et le conduisirent à Tolède. Ils le jetèrent dans un réduit à balais, dans le monastère des Mitigés, dans une forteresse qui domine le Tage. Le cachot était sombre et étroit. Tous les jours, les moines le flagellaient à tour de rôle. Ils lui criaient de renoncer à sa réforme, de revenir à la règle mitigée.
» Affamé, battu, repoussant de crasse, Jean de la Croix se taisait obstinément. Depuis des années il prônait l’oubli de la mémoire, le détachement pour garder l’âme en paix, le dépouillement, l’humilité [3]. […]
Nous nous contenterons ici de dresser un bref panorama de la vie de sainte Thérèse.
Teresa est née le 28 mars 1515, à Gotarrendura, campagne proche d’Ávila. Son père était particulièrement austère et sévère. Sa mère semble ne pas avoir été très joyeuse, et lisait de nombreux romans de chevalerie, passe-temps qui minerait les jeunes années de Teresa (ce qui n’est pas sans nous rappeler la jeunesse de saint Ignace de Loyola). Le grand-père paternel de Teresa avait été Juif et, après sa conversion, fait pénitent par l’Inquisition et méprisé par la population, il changea de ville. Sa conversion n’était pas si forcée qu’on pourrait le croire, puisque ses fils furent bons catholiques (l’un d’eux, une fois veuf, entra chez les hiéronymites) et sa petite-fille la sainte que l’on connaît. Cette ascendance juive n’empêcha pas au père de Teresa d’obtenir un certificat de limpieza de sangre…
La petite Teresa rêvait de mourir en martyre chez les Maures. Puis elle bâtissait des ermitages dans son jardin. La perspective de la vie conjugale la rebutait ; seul Dieu l’intéressait (« Dieu seul suffit », aimait-elle à répéter) et semblait l’appeler, après quelques écarts de jeunesse. Une maladie, l’année de ses 17 ans, affirma sa vocation. Saint Jérôme, qu’elle lisait, la convainquit : « On est assez riche quand on est pauvre avec le Christ ». Quand ses frères s’embarquaient pour les Indes (devant pour la plupart s’y enliser et y mourir), Teresa se dirigeait vers les portes du couvent de l’Incarnation : elle y entra à l’âge de 20 ans, le jour même où son frère Antonio – 15 ans – pénétrait dans le monastère de Santo Tomás (avant de le quitter… pour les Indes).
Teresa prit l’habit le 2 novembre 1536, en la commémoraison des fidèles défunts. Elle prononça ses vœux perpétuels un an plus tard, le 3 novembre 1537. Sur ces entrefaites, elle apprit à l’automne 1538 la mort de son frère Rodrigo, en Amérique, et se consola en lisant les écrits de spiritualité d’Osuna : « l’amitié avec Dieu est possible en cette vie d’exil ; et non pas vague mais plus intense et plus sûre que celle qui fut jamais entre frères et sœurs, entre mère et enfant ». Une vie d’oraison se profilait, mais les épreuves ne manqueraient pas, le don des larmes étant une belle image d’une vie peu avare en persécutions.
Le 15 août 1539, Teresa sombra dans un coma de quatre jours, pendant lesquels on la crut morte, seule l’obstination de son père l’ayant préservée d’un enterrement hâtif. Paralysée neuf mois durant, elle fut considérée comme guérie en 1540, alors qu’elle avait 25 ans.
Le 18 janvier 1546, cinq frères de Teresa sont engagés dans la bataille d’Iñaquito, au Pérou. Antonio y est tué d’un coup d’arquebuse. En Europe, la carrière d’une future sainte s’ouvrait. Teresa conversait avec Dieu, et se dévouait à saint Joseph, à l’intercession duquel elle devait ses guérisons passées. « Il ne s’agit pas de beaucoup penser, mais de beaucoup aimer. » La lecture de saint Augustin la ravissait.
Pour progresser sur son chemin spirituel, la Providence plaça sur sa route un jeune confesseur jésuite, âgé de 23 ans : Diego de Cetina. « Il l’engagea à se garder de l’exaltation, à poursuivre l’oraison et à être plus généreuse selon le message d’Ignace de Loyola. […] Cetina lui demanda de se mortifier, de se flageller. Des mortifications qui à l’époque n’étaient pas du goût de Teresa.
» Elle se mit à porter un cilice dont le métal lui raclait les chairs et à dormir sur un lit d’orties [4]. » Ces mortifications sont passées de mode, mais elles ont contribué à faire de grands saints. Il est pourtant mal vu, désormais, de les défendre : toutefois, nous aimerions beaucoup voir quelque théologien ou spiritualiste contemporain en faire l’apologie, l’exégèse, la théologie…
La première extase devait bientôt survenir, au détour d’un Veni Creator (que l’on voulait supprimer des ordinations épiscopales dans la réforme liturgique d’après Vatican II), avant de devenir habitude, au moment où Charles Quint s’éteignait pieusement à Yuste, en disant « Jésus », s’étant confessé, regrettant notamment de ne pas avoir fait condamner à temps Luther, à Worms.
En septembre 1560, l’oraison prodiguait de nombreuses grâces à Teresa, qui eut une vision de l’enfer, dont elle trembla longtemps, y voyant de plus la damnation des luthériens si nombreux (elle offrait ses mortifications à leur attention)…
Mais pour lutter contre l’enfer et le démon, la Providence voulait que Teresa réformât le Carmel, et se lançât dans une vaste entreprise de fondations, à grande échelle. Son premier couvent fut fondé grâce aux métaux précieux américains (contribution de son frère Lorenzo), à la demande des nièces de doña Guiomar. C’était le premier pas d’un long marathon, semé d’embûches… En un peu moins de vingt ans, Teresa devait fonder dix-sept « petits châteaux forts chrétiens [5] ». Plus que les guérisons qu’elle a opérées, c’est là son œuvre la plus formidable et pérenne.
Le Carmel, grâce à sainte Thérèse, revenait aux règles primitives, après quelques décennies et siècles de relâchement. Voici la règle réformée :
« San José revenait aux sources, aux Pères du désert. L’Ordre était végétarien, sauf pour les malades. On jeûnait huit mois par an. Teresa mangeait des herbes, de la bouillie, des œufs, des lentilles. Les religieuses avaient pour ordinaire du pain, du fromage, des miettes et des fruits. Quand elles étaient trop pauvres, elles mangeaient des glands, exceptionnellement un œuf et une sardine. Teresa disait qu’on gagnerait son cœur en lui offrant une sardine.
» Les Carmélites déchaussées – c’est ainsi qu’on les appelait – étaient cloîtrées, tournées vers l’oraison et marchaient pieds nus dans des espadrilles de chanvre, ignorant la brûlure du soleil et les sols glacés. Elles portaient un manteau blanc de serge avec un bouton de bois en guise d’agrafe, un scapulaire de bure, des tuniques d’étamine qui grattaient la peau et des couvre-chefs taillés dans le chanvre. Un épais voile noir couvrait leur visage. Leur habit de serge ou de bure était taillé dans cette toile grossière qui couvrait chevaux et bêtes de somme et où se logeait la vermine [6]. »
Elle fit preuve de zèle pendant deux bonnes décennies, et fit un bien infini à l’Espagne puis, indirectement, par ses suivantes telle Ana de San Bartolomé, au monde entier. Sans oublier son intercession au ciel.
Le révérend père Antonio de Jesús, ancien compagnon de saint Jean de la Croix, fraîchement nommé provincial des Carmes déchaussés, fit venir Teresa à Alba de Tormes. Ce serait son dernier voyage terrestre. Elle perdit du sang, et savait qu’elle allait mourir. Son état s’aggrava le 3 octobre, et elle reçut l’extrême-onction à neuf heures du soir. Elle passa directement de l’oraison à Dieu, le visage d’un blanc parfait et lisse comme la lumière, un crucifix fermement tenu en main. Le 4 octobre 1582, à neuf heures du soir, la petite cloche de son couvent sonna le glas. Une sainte était née au ciel. L’un de ses premiers miracles depuis le paradis fut la conversion et la confession de son frère Agustín, quelques jours avant de mourir, à Lima :
« En 1610 le père Luis Valdivia raconta qu’à Lima vingt et un ans auparavant, un gentilhomme frère de Teresa de Jesús dont il ne se rappelait plus le nom avait réclamé un confesseur jésuite avant de mourir. […]
» Dans les derniers moments qu’il partagea avec ce prêtre, Agustín eut comme un sursaut à onze heures du soir. Le père Valdivia lui demanda s’il ressentait quelque chose de surnaturel. Agustín répondit que sa sœur venait de lui révéler qu’il était sauvé [7]. »
Les Espagnols sont réputés pour être fiers et avoir le sang chaud, ainsi qu’un sens prononcé de l’honneur. La personnalité de sainte Thérèse d’Ávila est plus que vigoureuse. Son chemin a été parsemé de personnages formidables, dont Catherine Delamarre dresse de magnifiques portraits.
Ce duc de Gandie, grand d’Espagne et vice-roi de Catalogne était l’arrière-petit-fils du pape Borgia Alexandre VI, aux mœurs particulières. Mais sa descendance n’était pas vouée à la malédiction, et nous pouvons nous confier à saint François de Borgia, canonisé par le pape Clément X. Sa vie est d’une puissance inouïe, comme sa conversion :
« L’impératrice Isabel était morte en couches en mai 1539 et par humilité elle avait refusé de se faire embaumer. En tant qu’écuyer de l’impératrice, François de Borgia dut conduire son corps jusqu’à Grenade. Là on ouvrit le cercueil et on lui demanda de reconnaître la dépouille, pour être sûr qu’il s’agissait bien de la souveraine, trente jours après sa mort. Il conçut un tel dégoût à la vue du cadavre en décomposition avancée qu’il fit vœu de ne plus servir aucun souverain mortel. Désormais il ne servirait plus que Dieu, seul maître immortel de l’univers [8]. »
Le duc entra dans la Compagnie de Jésus en 1546 et en devint le troisième supérieur général dès 1565. Il rencontra Teresa, vit la main de Dieu en elle, et lui fit confiance.
« [Teresa] rencontra Pedro de Alcántara chez doña Guiomar de Ulloa en août 1560. Franciscain déchaussé, il avait organisé la branche réformée des Frères mineurs et écrit un Traité de l’oraison et de la méditation.
» Elle éprouva une fascination mêlée d’effroi devant cet être singulier au visage de cire, à l’aspect cadavérique. Elle fut frappée par sa force quasi immatérielle […]
» La pâleur de sa figure émaciée trahissait les privations. Franciscain dès l’âge de dix-neuf, Pedro de Alcántara avait cherché à se discipliner lui-même avant de réformer son ordre. Sa volonté d’ascétisme lui avait imposé de ne jamais lever les yeux sur ses frères pendant trois ans. Il se dirigeait au son de leurs voix. Les yeux rivés sur le sol, il attendait qu’on le guide pour se déplacer. Il n’avait pas regardé de femme pendant plusieurs années.
» Il portait un cilice fait de lames de fer-blanc. Pour le monde il n’éprouvait que mépris. Par les routes poudreuses de Castille, brûlées par le soleil, il marchait sans chaussures, entièrement nu sous son habit de grosse bure couvert d’un mantelet. En hiver, il poursuivait son chemin dans la neige, bravant le hurlement des tempêtes sur la plaine glacée. […]
» Pedro de Alcántara mendiait son pain. De son pas égal il avait parcouru l’Espagne et l’Italie. Pour surmonter le sommeil, il se tenait à genoux ou debout. Il ne dormait qu’une heure et demie par nuit, assis, la tête appuyée sur un billot de bois. Sa cellule de quatre pieds et demi de long ne lui permettait pas de s’allonger. Il ne mangeait que tous les trois jours. Il lui arrivait de jeûner pendant une semaine. Il revenait à la vie des pères chrétiens du désert. »
« Les carmels masculins naquirent à Duruelo, dans une maison petite et insalubre pourvue d’un vestibule, une chambre à alcôve avec un grenier et une petite cuisine. Dans les ermitages on ne tenait pas debout. Les moines dormaient à même le sol, dans le foin. Ils priaient dans l’église en ruines, où la neige recouvrait lentement leurs robes de bure. Ils méditaient face à des croix et des crânes humains. Leur seule richesse, cinq horloges qui rythmaient le temps de l’ascèse et conjuraient le vide. Teresa disait qu’ils s’ensevelissaient dans la solitude. Elle aimait ces maisons étroites et pauvres, qui lui rappelaient le temps des premiers pères du désert. […]
» Jean de la Croix écoutait le chant des oiseaux et le bruit des rivières, se concentrait dans une nature d’eaux courantes et de chênes verts. Il se nourrissait d’herbes et prêchait le dénuement, lui qui enfant se perdait dans les foires bruyantes de Medina del Campo et voyait les pèlerins à l’épaisse cape de bure s’éloigner sur les routes poussiéreuses de Castille. Il écrit : “Elle se lasse et se fatigue, l’âme qui veut satisfaire ses penchants ; elle ressemble à celui qui, poussé par la faim, ouvre la bouche pour se rassasier de vent [9]”. À présent, tapi dans son ermitage malgré la pluie et le givre, il écoutait son esprit assailli par les pensées. Les oiseaux se posaient autour de lui. Il s’entraînait à ne plus entendre leur pas sautillant, à ignorer leur œil interrogateur.
» À ceux qui lui rendaient visite, il conseillait de fuir le monde, d’ignorer la compagnie des princes et des grands, de fuir les palais pour se réfugier dans des ermitages vides. Il décrit cet itinéraire dans sa correspondance : “On vit sur la terre comme des étrangers, des pauvres, des exilés, des orphelins, dénués de tout, qui s’avancent par une terre sans chemin…” [10] ».
*
Des tempéraments époustouflants, qui doivent nous servir de modèles. Il est à espérer que, après le relâchement sans pareil qui a commencé il y a près d’un demi-siècle, des réformateurs de la même trempe et à la sainteté égale se chargent de revitaliser, sous la direction de l’Esprit Saint, nos ordres religieux moribonds – dont les plus atteints sont déjà excommuniés et anathématisés par la Providence qui les prive de toute vocation…
[1] DELAMARRE (Catherine), Thérèse d’Avila. L’oratoire et la forteresse, Paris, Salvator, 2014, 352 p., 24, 50 €. Cet ouvrage a le mérite de mettre en parallèle la vie de sainte Thérèse d’Ávila avec des événements importants de l’histoire espagnole, notamment en Amérique, où les frères de Teresa sont employés.
[2] Ibid., p. 258.
[3] Ibid., p. 276.
[4] Ibid., p. 104-105.
[5] Ibid., p. 185.
[6] Ibid., p. 146-147.
[7] Ibid., p. 333.
[8] Ibid., p. 107
[9] Saint Jean de la Croix, La Montée du Carmel, Paris, Éditions du Seuil, 1929.
[10] DELAMARRE, op. cit., p. 199-200.
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