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Il est de bon ton dans une certaine frange de la blogosphère catholique de cracher sur le thermomètre et de repousser d’un revers de main toute possibilité de guerre civile et de délitement de la France comme des fantasmes de “groupuscules d’extrême-droite”.
Les voix médiatiques sont pourtant de plus en plus nombreuses à craindre cette possibilité d’une guerre civile en France, qu’il s’agisse de journalistes tels Eric Zemmour prédisant une « guerre civile entre communautés » [1] ou Ivan Rioufol titrant « une guerre civile menace la France » [2], ou bien d’écrivains tels Michel Houellebecq qui dans son dernier roman, « Soumission », décrit une France en proie à une guerre civile opposant militants d’extrême droite et groupes musulmans d’origine africaine, ou encore Jean Rolin dont le dernier roman, « Les Évènements », met la France en état de guerre civile aux mains de milices (les unes d’extrême droite ou d’extrême gauche, d’autres confessionnelles, chrétiennes et musulmanes) s’opposant là aussi à travers tout le territoire.
La crainte d’une possible et prochaine guerre civile en France est ainsi partout, dans les médias, dans les esprits et même jusque dans la rentrée littéraire de ce début d’année.
Loin d’être réservé à l’extrême-droite, ni même à la droite, ce constat d’un embrasement possible à travers toute la France est aussi confirmé par des remontées de terrain. Ainsi, le porte-parole du « Collectif démocrate des couleurs de la diversité » établi à Drancy reconnait que « le malaise est dans la bouche de tout le monde. La cocotte-minute est déjà prête à exploser. Si vous ajoutez l’amalgame avec l’islam pour les assassinats et quelques "attentats" contre les mosquées, le mélange deviendra plus puissant que celui qui provoqua les émeutes de 2005. Préparez-vous à ce que cela éclate… » [3]
La guerre civile que tant craignent a-t-elle déjà commencé ? Nombreux sont ceux qui s’interrogeaient déjà suite à la multiplication le mois dernier d’incidents mettant en scène des “déséquilibrés” [4] :
La question s’était déjà posée régulièrement à l’occasion des récurrentes émeutes urbaines. Celles de 2005 et celles de 2007 à Villiers-le-Bel avaient choqué jusqu’à la presse internationale qui n’avait pas hésité à parler de guerre civile [9], la qualifiant d’ailleurs d’« émeute ethnique ».
La question s’était aussi posée à l’occasion des violents débordements qui ont accompagné en France tous les matchs de l’Équipe d’Algérie en coupe du monde de Football en juin et juillet 2014 et lors des manifestations de soutien à Gaza en juillet et août 2014, manifestations accompagnées elles aussi de violences et de voitures brulées (Barbès, Sarcelles) aux cris là encore de Allah Akbar.
Les Français, de même, se sont habitués, mois après mois, à entendre qu’un ou plusieurs jeunes avaient cherché ou réussi à prendre l’avion pour partir faire le djihad en Syrie ou en Irak.
La fréquence des incidents provoqués par des populations qui semblent à chaque fois présenter un profil bien similaire interroge : sont-ce les signes avant-coureurs d’une guerre civile en gestation ? Chérif Kouachi déclarait bien en 2008 : « On est des jeunes de cité, on s’enflamme, mais il n’y a rien de plus ! » [10]. L’histoire nous montre ce qu’il est pourtant devenu.
Les attentats terroristes de la semaine passée ne font qu’accentuer ce questionnement. Le ministre de l’intérieur, Jean-Yves Le Drian déclarant que la France connait actuellement une « opération militaire » sur son territoire avec dix mille militaires déployés estime qu’en France comme à l’extérieur, « l’ennemi est le même, c’est-à-dire des groupes terroristes qui veulent toucher à nos libertés » [11]. De cet aveu ministériel à la question suivante il n’y a qu’un pas : sommes-nous en guerre civile ?
Mais qu’entend-on par guerre civile ? Le débat sémantique pour savoir s’il s’agit d’un « conflit prolongé de grande échelle, politiquement organisé, physiquement violent, qui se produit au sein d’un pays, principalement entre deux larges groupes de citoyens qui se disputent le monopole de la force physique » [12] ou que l’on que considère qu’il y a guerre civile dès lors que le recours à la violence à l’intérieur des frontières d’un État a atteint une certaine ampleur [13] (ce que les partisans de la première thèse appellent pudiquement des « épisodes de violence politique intenses mais limités » ou « conflit interne ») n’est finalement pas d’un intérêt majeur.
Il est beaucoup plus essentiel de comprendre quels sont les germes potentiels d’une guerre civile. Elle se produit généralement quand vivent et se développent sur le même territoire deux populations dont les profils ethnique, linguistique, religieux, culturel ou politique sont trop différents. En bref quand des éléments constitutifs des identités sont trop discordants et que les deux groupes partagent le même territoire, contrairement par exemple à ce qui peut exister dans un empire où deux cultures fort différentes peuvent coexister en harmonie sur deux morceaux bien distincts du territoire. Ce constat enseigné par l’histoire est loin d’être une observation moderne puisque Aristote, au IVe siècle avant Jésus-Christ, mettait déjà en garde contre l’absence de communauté ethnique et l’accueil trop nombreux d’étranger au sein de la cité [14].
Cette crainte de guerre civile n’est d’ailleurs pas propre à la France mais à une grande partie des pays d’Europe (d’Europe de l’Ouest principalement). Il est flagrant que l’émergence d’une population vivant sur le territoire français et se sentant de moins en moins française cumule tous ces traits : l’origine immigrée (principalement africaine ou plutôt nord-africaine), la religion (l’islam), la langue (l’arabe, lié à la religion), la culture (elle aussi très fortement liée à l’islam) et politique (la charia servant de loi de référence et possédant ses propres tribunaux).
L’accent, autrefois mis sur l’origine ethnique des populations l’est maintenant sur la religion. L’effacement du premier critère au profit du second ne montre pas un déplacement du conflit, mais plutôt son amplification. Ce qui était vu autrefois comme une simple menace ethnique et démographique a, avec le temps et l’augmentation de ces populations, pris un jour nouveau avec l’émergence de zones, de plus en plus nombreuses, où l’islam et sa culture sont majoritaires, ou du moins fortement implantées à travers des attributs architecturaux (mosquées), vestimentaires (voile, djellaba, voir burqa), culinaires (halal, absence de porc et d’alcool), et tant d’autres...
Le mode d’expression d’une possible guerre civile doit lui aussi être explicité. Il serait trompeur de s’imaginer qu’elle prend systématiquement la forme d’une bataille rangée, d’une guerre totale ou de tranchées comme les grands conflits internationaux, ce n’est généralement pas le cas. On observe le plus souvent un conflit larvé, conflit permanent durant lequel, dans un certain nombre de villes et de quartiers, les gens continuent malgré tout à vivre et à travailler, au sein de leurs communautés, le danger toujours à l’esprit, l’arme constamment à la ceinture ou posée sur le dessus du tableau de bord.
« La France est en guerre. En guerre civile peut-être, demain. Son ennemi est l’islam radical, l’islam politique, l’islamisme djihadiste » [15].
Un argument régulièrement avancé pour repousser l’idée d’une guerre civile en France est que “cela ne peut pas arriver en Europe, ce sont des pays trop développés”.
Cet argument n’a pourtant aucun sens. La guerre n’est jamais affaire de niveau de civilisation. Il suffit de voir le Liban, qui avant de se déchirer en 1975 dans un conflit qui dure depuis des décennies était l’un des pays les plus développés de la région. Mais personne n’écoute l’enseignement du Liban dont les prélats et hommes politiques chrétiens nous mettent en garde depuis des années contre la “libanisation” progressive de la France.
De même l’argument du “pays européen” est démenti par les guerres civiles yougoslaves et ukrainiennes. Ces deux guerres furent pourtant déclenchées par des éléments bien différents. Si la crise ukrainienne est avant tout politique et liée à un conflit entre États-Unis et Europe d’un coté et Russie de l’autre, la guerre civile en Bosnie-Herzégovine de 1992 à 1995 puis la guerre du Kosovo en 1998-1999 furent basées sur un conflit religieux. Là encore l’Ukraine et l’ex-Yougoslavie étaient alors des pays pourtant fort développés.
Il est du reste frappant de voir que Jean Rolin s’est inspiré de son expérience d’ancien correspondant de guerre en ex-Yougoslavie (où il s’est rendu à plusieurs reprises entre 1992 et 1997) pour écrire « Les Évènements », montrant que pour ceux qui ont déjà vécu ces conflits entre populations musulmanes et populations chrétiennes, il est clair que la France emprunte en ce moment le même chemin.
Enfin, il nous faut bien nous rappeler que la guerre civile a existé en France, que ce soit lors de la révolution française (comment appeler en effet autrement les massacres de Vendée et de Bretagne ?) ou de la période insurrectionnelle de la Commune de Paris en 1871. Pourtant dans ces deux périodes de notre histoire, les différences culturelle, ethnique et linguistique ne rentrèrent pas en compte dans l’équation qui mena aux combats. Loin d’être des guerres appartenant à notre passé, « les guerres civiles sont malheureusement des guerres d’avenir » [16].
Cette guerre civile nous ne la voulons pas, mais d’autres le veulent. C’est la théorie prônée, par exemple, par Abou Moussab Al-Souri, théoricien du djihadisme qui a vécu de nombreuses années en Europe. « Ayant une grande connaissance de l’étranger, il prônait la créations de cellules clandestines sans liens avec un commandement central pour ne pas se faire détecter. Ces cellules devaient pouvoir passer à l’action avec leurs propres moyens pour déclencher une guerre civile en créant des divisions entre les musulmans et les populations locales » [17].
Il est essentiel de noter que brandir la « majorité pacifique » n’est jamais pertinente. Elle est généralement passive et attentiste, ne faisant que suivre de loin les mouvements dans un sens ou dans l’autre. Ce sont justement les groupes les plus radicaux, devenus minorité conséquente et active, qui doivent être pris en compte (comme lors de la révolution ou de la résistance). Voilà pourquoi l’argument d’une majorité de musulmans pacifique, souhaitant vivre en paix, même s’il est véridique n’est pas pertinent.
Y aura-t-il une guerre civile en France ? Dieu seul le sait. Nous pouvons cependant affirmer très clairement que nous voulons à tout prix l’éviter. Cette guerre civile, nous ne la voulons pas pour notre pays, parce qu’il est notre et que voir couler le sang et les larmes sur notre sol ne nous inspire qu’horreur et dégout. Si cette guerre civile arrive, ce n’est que contraints que nous défendrons alors nos vies, notre identité et notre foi, mais cela devra se faire alors avec toute l’ardeur des chevaliers francs, des croisés chrétiens et des résistants.
Nous osons croire qu’il est encore temps de restaurer la France et éviter ce basculement. La première guerre mondiale était prévisible, tous les signes avant-coureurs connus, mais rien ne fut fait. Si cette guerre civile arrive, elle ne le sera que parce que les élites et le peuple n’ont pas daigné écouter à temps les cris d’alarme qui se multiplient à travers la France.
[4] Lire à ce sujet « le temps des djihadistes low cost »
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