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« De la même façon, il a été souvent dit récemment que le Japon était "une société verticale" du fait que le comportement défini comme bon était la soumission sans contestation des membres des diverses structures sociales comme le foyer (maison), entreprise (société), localités (hameaux) aux enseignements du dirigeant (chef de famille, chef d’entreprise, chef de village). Cela se fonde sur la pensée suivante : l’absolue confiance envers les personnes qui nous sont supérieures est nécessaire pour permettre au "dirigeant (qui élève les forces vives des gens qui l’entourent), de travailler à la réalisation d’un monde où tous peuvent vivre joyeusement" [1] »
Notre société occidentale se perd car elle ne sait plus se soumettre à ce qui lui est supérieur. Plus précisément, elle ne sait même plus reconnaître ce qui lui est supérieur. L’inverse de la société japonaise, l’inverse de toute société saine, l’inverse de toutes les sociétés passées.
Au Japon, l’homme sait qu’il est faible devant la nature [2], qu’il est ignorant devant les mystères du monde, qu’il est condamné à se parfaire sans jamais atteindre la perfection. À partir de cette pensée, de cette réflexion de bon sens que tout être humain ne peut que ressentir s’il ne se laisse pas aller au penchant vaniteux du cœur humain, il devient normal de reconnaître chez certains hommes le rôle et la lourde charge de travailler au bonheur de ses congénères. La charge est assez lourde, et le travail assez difficile pour exiger une confiance absolue au chef. Cela est naturel à l’homme. Tout le monde l’a forcément vécu à un certain niveau : dès que les circonstances (pour ne pas dire tout le temps) exigent une réalisation quelconque, ne serait-ce que préserver le calme (ce qui demande une collaboration entre hommes), il est beaucoup plus facile de confier la direction à un chef que tous reconnaissent. Et il est beaucoup plus efficace de respecter ce chef, sans discuter à tout bout de champ ses décisions, sous peine de stagner, voire de briser les liens entre les membres de la communauté ainsi formée.
Cela ne veut pas du tout dire que l’homme est juste soumis et rendu débile tel un mouton bien sage – il est d’ailleurs frappant de constater que nos contemporains n’ont jamais été aussi moutons qu’aujourd’hui, alors même qu’ils sont soi-disant « libres ». Au contraire, la confiance donnée et la fidélité réelle chargent le chef d’une énorme dette. Quel homme peut faire le mal en sachant qu’il trahit ses congénères de façon concrète, en trahissant ses paroles ? Peut-il encore se présenter devant eux ? Autrement dit, dans le contexte de fidélités réciproques et de confiance partagée, il devient beaucoup plus difficile pour n’importe qui, et le chef en particulier, d’être mauvais, car les conséquences morales sont bien pires que dans notre société déshumanisée, sans spiritualité, où donc il n’y a jamais de trahison. Notre société occidentale ne connaît à peu près plus la trahison morale, nous sommes dans le « pas vu, pas pris », ou voire : « tant que je n’abuse pas trop, je continue ». Dans une société verticale, tout est différent, même une trahison minime qui n’apporte aucune conséquence matérielle peut avoir des répercussions fantastiques : donner sa confiance et sa fidélité dans la soumission n’est pas un acte anodin, et ce geste n’aime pas se faire trahir.
Mais la société verticale montre toute sa force, plus que dans la jugulation du mal des chefs, dans la possibilité donnée aux dirigeants de faire le bien. Imaginez un seul instant que le chef à qui nous sommes soumis soit bon, les conséquences pour la société en sont démultipliées : le chef, plutôt que de perdre son temps à louvoyer entre les hommes pour imposer une volonté non respectée, peut enfin se consacrer à la réflexion de fond, demander les avis, puis prendre une décision d’autorité qui sera suivie, car on lui fait confiance. Cela permet de plus aux sujets de ne pas se préoccuper de ce genre de problèmes vitaux, mais bien embêtants, et de se consacrer à faire leurs vies. Tout le monde peut ainsi vivre plus harmonieusement ; on se soumet librement dans la confiance car on sait que l’on ne sait pas, et mieux vaut faire confiance et être fidèle à son chef, aux anciens, à une famille, qui cultivent cette art depuis des générations, et qui se fondent dans l’histoire, plutôt que de briser l’équilibre, de se détourner de ses devoirs et de sa vie. Le point crucial est l’absence de hiérarchie de valeurs en ce sens où la soumission et la fidélité sont les contreparties à l’immense responsabilité du chef d’une part, et la reconnaissance de ses propres limites d’autre part. Le tout trouve son équilibre dans la soumission au Ciel, aux kamis, ou à Notre-Seigneur Jésus-Christ qui remet tous les hommes sur le même plan face au monde perçu dans sa globalité. Et il faut se souvenir que l’homme bon est censé être le modèle pour tous : tous doivent chercher à devenir. Le génie de la société verticale est de reconnaître que personne n’est ni au même stade du chemin, ni ne l’exprime de la même façon. La société « inégalitaire » a ceci de fort qu’elle reconnaît l’unicité de chaque existence dans son originalité et ne cherche pas à comparer ce qui n’est pas comparable, tout en créant une communauté humaine dans la nature, dans la recherche du bien et de la vérité, qui peut pourtant avoir de multiples facettes. C’est l’heccéité de Duns Scot.
Reconnaissons notre faiblesse, donnons notre confiance et soyons fidèles.
[1] Makoto Takematsu, Shinto et légendes japonaises, Tokyo, Kawade, 2013, p.18.
« また、近年までの日本のあり方は「タテ社会」などといわれた。地域(村落)、企業(会社)、家庭(家)の構成員が指導者(村長、社長,家長)を批判せず、上の者の教えに従って行動するのが善だとされてきたからだ。
これは「指導者は(まわりの者の生命力を高め)、みんなが楽しく生きる世界を実現するために働いている」という、上の者への絶対的な信頼のうえに立つ考えだ。 »
[2] Nul besoin, nous croyons, de rappeler certains événements dévastateurs récents - et récurrents - difficilement essuyés par l’archipel
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