L’infolettre du R&N revient bientôt dans vos électroboîtes.
Dans une période troublée par la perte et la destruction des repères fondamentaux de l’homme en France, livrée aux flux incessants de la mondialisation culturelle, au relativisme et à une fausse modernité sans valeur, la conception d’un esprit particulier lié à un territoire est difficile à défendre mais reste essentielle. Cet esprit unique, c’est celui du sol et de l’Homme français. Unique car à la fois racine d’une culture et d’une civilisation mais aussi incomparable aux autres formes de représentation, de comportement, et de relations avec l’espace et la vie. Cette particularité est un élément de la culture de l’Occident chrétien, aussi est-il seulement possible de la situer à partir des premières heures de la Chrétienté en Europe, plus précisément, dans l’Europe post romaine. Par ailleurs cette description de « l’esprit français » est une expression qui vient d’un ressentiment et de l’aboutissement d’une réflexion personnelle après comparaison avec d’autres pays.
Lorsque l’on évoque la « verticalité » de la culture française ou de l’esprit français, on réalise en fait le constat d’une imprégnation chrétienne, catholique.
La Chrétienté est un équilibre entre Dieu et les Hommes, équilibre essentiel au développement des sociétés, puisqu’il s’agit d’une cohérence totale entre l’ordre divin et l’ordre naturel et c’est de cette rencontre que naît notre civilisation. Ceci s’oppose à deux monothéismes que sont le judaïsme et l’Islam et qui tendent dans leurs pratiques comme dans leur essence religieuse à faire basculer la société, de l’Homme vers Dieu en niant l’Homme et son libre développement, en imposant l’idée religieuse d’une manière totalisante, en la mêlant au politique et la proposant comme unique source de définition de l’individu. Certes, le Christianisme a pour but de placer Dieu au cœur des Hommes et de leurs actions, afin de laver le pêché originel par son Fils, mais c’est aussi et surtout une philosophie qui laisse place au doute et à l’interprétation, rôle de l’Eglise. Par ailleurs, cet équilibre chrétien s’oppose aussi à une organisation politique et morale qui se concentre sur l’Homme et niant l’absolu de Dieu, c’est-à-dire, l’absolu structurant de la conscience et de l’existence humaine. La Révolution et ses conséquences sont l’illustration de ce basculement vers l’Homme, qui a abouti à une idée abstraite et dangereuse d’un « être suprême », d’un homme nouveau. (Cf. Zeitgeist).
La Chrétienté est donc cet équilibre qui permet aux Hommes, par la transcendance, de s’épanouir et de se développer. L’ordre naturel, celui de l’Homme au stade primitif et celui de son introduction dans la Nature brute, ne peut donc mener à une perfection de l’Homme puisque celui-ci le contiendrait dans sa condition primaire. Le déséquilibre en faveur de l’Homme évoqué plus haut provient d’un faux dépassement de l’ordre naturel qui exploite l’orgueil, l’instinct et la facilité. La relation essentielle entre l’ordre naturel et l’ordre divin place donc l’Homme au centre de ce monde. Parce que l’ordre naturel émane aussi d’une création de Dieu, on ne peut s’en détacher –faute de quoi nous mettrions en péril l’homme et ses libertés essentielles, quand bien même il faudrait s’en extraire. Il s’agit donc d’une délicate nuance qui permet à l’Homme de rester enraciné en regardant le Ciel pour s’épanouir et créer la civilisation.
Voici donc la cohérence entre la Terre et la Ciel, entre le sol et l’esprit, entre l’Homme et Dieu. L’équilibre chrétien permet une alliance de l’esprit et de l’âme humaine renouant le lien originel entre le Ciel et la Terre afin de guérir l’humanité marquée par la chute du Premier homme, tout en acceptant sur Terre, la mort et les défauts de la Nature humaine des pêcheurs ; une dimension importante de la Nouvelle alliance. La civilisation chrétienne peut alors répondre au plan de Dieu en atténuant les conséquences du pouvoir de Satan. Ceci correspondrait à un équilibre entre la Vie et la Mort, entre Dieu et Satan ; rencontre dont le résultat serait le Temps, le temps de l’Homme qui n’existe que dans ce monde-ci et non dans le Royaume des Cieux, lieu de l’infinité et de l’éternité. L’Homme était auprès de Dieu, dans l’Eternel. Le pêché originel a précipité l’Homme dans sa chute, dans un monde détaché éloigné de Dieu. Or Dieu donne la Vie et est la source du Bien, Satan rend l’Homme périssable et mauvais. Il pensait gagner sur Dieu par la mort, mais la résurrection du Christ a montré que Dieu gagne et gagnera, en offrant la vie éternelle. La situation immobile, pendant laquelle s’écoule le temps, s’est donc renversée en faveur de Dieu qui ramène les Hommes auprès de lui par la résurrection.
Revenons cependant à la Chrétienté et à son équilibre pour établir le lien avec l’esprit français. Afin de comprendre la dite « verticalité », il est nécessaire de comparer avec un autre esprit, l’esprit germanique. La beauté des paysages de France est par exemple illustrée par le bocage normand, les vignes, les lavandes de Provence. La culture classique française place l’excellence humaine, la finesse et la délicatesse au cœur de ses œuvres, c’est une construction humaine inspirée par Dieu, qui est projetée vers le Ciel et marquée par les qualités humaines. Outre-Rhin, la beauté géographique seule suffit à émouvoir la culture germanique. Cette beauté est souvent associée au Rhin, simple fleuve mis en musique par R. Wagner, aux montagnes de Bavière et aux falaises du Nord. L’art romantique exalte la Terre et ressent l’Homme dans un regard métaphysique face à la nature brute. Celle-ci est célébrée, contrairement à l’esprit français qui loue la marque de l’Homme sur la Nature, fruit de son travail. L’esprit allemand entretient alors une relation binaire avec la Nature, une relation d’excès. Il la célèbre dans son état le plus simple, est en extase devant celle-ci et créé une relation tout à fait primitive entre les hommes et la terre, « Blut und Boden » (le sang et la terre). Ou alors, il écrase la Nature, la détruit, et pense lire dans la Bible (Genèse 1:28 Dieu donne à l’humanité l’ordre d’assujettir et dominer sur la terre) le devoir de s’en extraire totalement en la maîtrisant voire en l’anéantissant. Ainsi, l’esprit allemand a donné naissance à deux grands mouvements opposés. D’un côté, le comportement économique de l’industrie toute puissante, de l’épuisement de la Nature et de ses ressources, de l’autre, les mouvements écologistes qui sont effectivement nés dans les pays anglo-saxons protestants, aux Etats-Unis et en Allemagne. La catholicité, française, cultive la Nature en la rendant humaine. Le soucis du détail, de la beauté et de la perfection légère et raffinée, parfois mêmes superficielles comme l’explique Cioran (in De la France), dont l’ouvrage cité constitue une clé de compréhension. Cioran va encore plus loin en décrivant l’esprit allemand comme une culture de l’abstrait, du métaphysique et de la lourdeur. Dans le domaine culturel, la notion de verticalité constitue donc l’essence de la civilisation française et de cet esprit particulier qui tente d’élever l’homme par son œuvre sur Terre vers le Ciel.
D’ailleurs, cette même relation brutale et directe avec la Nature se retrouve dans le protestantisme qui pousse l’homme a faire du christianisme une religion du Livre, suivant les Saintes Ecritures à la lettre, sans intermédiaire de réflexion et d’interprétation. Cette libre interprétation amène à des excès comme l’absence totale de modération politique et de recul par rapport aux évènements du présent, comme le montrent les interprétations annuelles de l’Apocalypse par les Evangéliques américains, et auparavant, la comparaison fallacieuse de l’Eglise à la « Prostituée » établie par M. Luther en Allemagne. A l’inverse, la religion protestante peut s’éloigner du message des Evangiles et assumer totalement la conception dite « libérale » de la Foi. La naissance du protestantisme en Allemagne n’est donc pas un hasard. La culture allemande qui s’est construite jusqu’au XIXe siècle a même connu sa propre dégénérescence, le national-socialisme, issu d’un mélange entre la Révolution française, cette culture en grande partie composée par le Protestantisme et le paganisme germanique.
La France est historiquement marquée par le catholicisme, et c’est bien par cette Foi que la France s’est élevée. L’Eglise est l’intermédiaire, la médiation entre les textes et les Hommes, entre Dieu et les Hommes. Le Roi jure sur les Evangiles et fait le serment de défendre l’Eglise, institution organisatrice. La culture française, excellemment catholique, et les autres cultures catholiques mais moins excellentes, accordent une place particulière à la représentation religieuse. Le catholicisme veut mettre Dieu en présence, et pour cela les symboles et les allégories sont indispensables. Ces éléments sont à la fois un facteur pédagogique, comme l’incarne parfaitement la sainte Liturgie (brillamment défendue par Tancrède), et une manière de célébrer la source divine de l’humanité et ses qualités au travers des œuvres et de la culture. Les temples protestants ne montrent aucune présence du Christ, aucun rappel de la Croix, aucun sacré propice à la prière ou à la construction d’une mentalité collective qui conditionne l’expression de la Foi. Le danger que prend le protestantisme, c’est le pari de croire que sans la marque de Dieu et du Christ, il est quand même possible de combattre Satan. Or cela amène à des interprétations aussi nombreuses que fausses de la Foi. L’Eglise a pour rôle de guider les Hommes et de les incarner, elle reçoit pour cela le Saint Esprit, tout comme le Saint Esprit pénètre les Hommes lorsqu’ils se tournent vers Dieu et la Croix. L’Eglise catholique incarne donc la verticalité religieuse : l’Esprit Saint est le liant. Ce modèle est celui de la verticalité qui ordonne le monde du sol jusqu’au ciel, tenant l’Homme dans un équilibre parfait. La France connaît ainsi une construction empirique en commençant par extraire la société du sol (paganisme) pour la diriger vers le Ciel, d’où le sacre des Rois. L’Eglise catholique prend la responsabilité de concevoir l’architecture chrétienne du monde, déterminée à édifier la Cité catholique.
L’Homme français a été façonné par cette pensée qui exalte le raffinement, la perfection et le travail comme manière de créer et de transformer, avec un but saint et noble, celui de l’accomplissement et servir Dieu. Le calvinisme, en revanche, place simplement le travail au centre de la vie, comme unique raison d’existence et de salut absolu. La France est par ailleurs le résultat d’une rencontre entre les cultures latine, celtique et germanique ; elle est au cœur de la civilisation occidentale. La première Nation véritablement catholique, « éducatrices des peuples » (Jean-Paul II, au Bourget en 1980), rivalisait largement avec le Saint Empire sur l’échelle de la fidélité au Christ, à ceci près que les Rois de France, contrairement aux Empereurs germaniques, n’ont pas prétendu être l’incarnation du Fils de Dieu. Certes, ils étaient les « Lieu-tenants » de Dieu, mais représentaient en réalité le fer de lance de la chrétienté, l’exemple magnifique de l’œuvre de l’Eglise. Et tout comme Satan s’est attaqué à l’œuvre de Dieu, l’Homme, le Mal a pénétré la France, fille aînée de l’Eglise. La pluralité des climats, des paysages et des régions ont fait de la France une Nation complexe qui est parvenu à rassembler des peuples et des cultures autour d’un même idéal, celui d’une nation catholique avec comme père, le Rex Christianissimus. Il s’agit de la transcription parfaite de la mission de l’Eglise dans le champ politique et social. Le Peuple de France et notre Patrie, méritaient leur titre d’alors, celui de la « Nouvelle Israël », cette nation choisie par Dieu et qui s’était humblement donnée une mission universelle chrétienne afin d’inspirer des peuples ; humblement, par contraste avec la prétention républicaine d’incarner la civilisation moderne et l’universalisme, alors que celui-ci n’est qu’athée : la Révolution est par conséquent l’anti-civilisation. Par ce rôle que tient la France, la « verticalité » se traduit donc aussi dans le domaine politique, avec la constitution d’un lien fort entre le Ciel et la Terre, à travers le France et par son Roi.
L’Esprit français assemble donc trois dimensions de la verticalité d’essence chrétienne, à travers la culture, la Foi et la construction politique. A cette essence particulière et incomparable, la France est l’illustration de l’Occident chrétien, c’est-à-dire de l’accomplissement humain, dans tous les domaines : politique, social, religieux, culturel, amoureux … . D’un groupe d’hommes qui a réussi a quitté l’Afrique il y a deux millions d’années pour engendrer les peuples du Moyen-Orient, de l’Asie et de l’Europe, est issu le groupe ethnolinguistique des Indo-européens. De cette famille sont nés les peuples d’Europe et leurs brillantes civilisations, parcourant déjà les mers, les continents. La Révélation puis la conversion au Christianisme ont donné naissance à l’Occident, dont le cœur, est la France catholique, sommet du Progrès humain inspiré par Dieu.
Le R&N a besoin de vous !
ContribuerFaire un don
Dernières dépêches : [NOUVEAUTÉ] Sortie du jeu de société chrétien « Theopolis » • Retour de la communion sur les lèvres à Paris • Etats et GAFA : l’alliance impie est en marche • [CHRISTIANOPHOBIE] Retour sur le concert raté d’Anna von Hausswolff • [ÉGLISE] Les hussards de la modernité à l’assaut des derniers dogmes de l’Eglise • [IN MEMORIAM] Charles, entre idole des jeunes et divinité laïque • [CHRÉTIENTÉ] L’épée d’Haïfa et la chevalerie rêveuse • Le service public l’a décrété : le wokisme n’existe pas • [IN MEMORIAM] L’Heure des comptes viendra-t-elle bientôt ? • [IN MEMORIAM] 4 novembre 1793 : Louis de Salgues de Lescure
Le Rouge & le Noir est un site internet d’information, de réflexion et d’analyse. Son identité est fondamentalement catholique. Il n’est point la voix officielle de l’Église, ni même un représentant de l’Église ou de son clergé. Les auteurs n’engagent que leur propre conscience. En revanche, cette gazette-en-ligne se veut dans l’Église. Son universalité ne se dément point car elle admet en son sein les diverses « tendances » qui sont en communion avec l’évêque de Rome : depuis les modérés de La Croix jusqu’aux traditionalistes intransigeants.
© 2011-2024 Le Rouge & le Noir v. 3.0,
tous droits réservés.
Plan du site
• Se connecter •
Contact •
RSS 2.0