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Si nos saints - et ils ne sont pas rares dans le martyrologue romain - nous voyaient défiler en bleu et rose, que diraient-ils ? Si nos héros - et ils panachèrent tous le mot martyre - nous voyaient nous défiler devant le printemps français, que diraient-ils ? Voilà la seule question : qu’auraient fait nos saints et nos héros hic et nunc ? [1] Autant dire que quand on est jeunes, ce qu’il est convenu d’appeler « printemps français » est obligatoire.

Le « printemps français » est très chrétien, il est le signe que d’assistés nous sommes devenus pauvres, il est la preuve que de soumis nous sommes devenus obéissants et la démonstration que de libertaires nous sommes devenus chastes. Et seuls ceux qui n’ont rien à perdre, à part la loi du Seigneur, laquelle est l’Amour vrai, gagnent en fin de compte.

Alors, la prochaine fois, Manuel, nous viendrons sans enfants, nous viendrons en martyrs. Notre martyre ne sera pas la mort, loin s’en faut pour le moment, ce sera la renonciation à nos carrières, à nos réputations, à nos conversations téléphoniques à deux [2], les coups et peut-être la prison.

Et ce sera tout.

Aux détours de conversations, certes, nous entendons certains se prendre à rêver de la fin du régime. Nous nous y opposons, non pas que ce régime qui tue les enfants, détruit la famille et veut s’attaquer aux vieillards maintenant ne le mérite pas, mais parce que nous n’y sommes pas prêts encore.

La politique chrétienne protège le bien commun, et le premier des biens communs est la paix civile. Aujourd’hui, la France de François Hollande est encore plus divisée que celle de Louis XIII, et comme en ce temps-là, ce n’est pas la Sainte Ligue, laquelle prendrait inévitablement le pouvoir en cas d’insurrection, qui serait la meilleure garante de l’unité de notre nation. Il ne s’agit pas de condamner les héritiers du duc de Guise : son action, comme les nôtres actuellement, fut nécessaire à la reconquête intellectuelle, de même que les (non-)événements de 1968 permirent à ses meneurs d’instaurer une domination culturelle de près de cinquante ans. Oui, agissons tant que nous sommes encore la minorité la plus forte de ce pays, mais tâchons surtout de devenir majoritaires. Car un chrétien n’entame une guerre que s’il sait que la situation en sera meilleure

L’histoire nous apprend que ce n’est pas la conversion d’Henri IV qui mit fin à la guerre des Français contre eux-mêmes, mais la création de l’Académie Française en 1635. A l’époque, catholiques et huguenots ne se comprenaient même plus : à force de vivre en sectes, ils avaient développé des « argots » différents. Aujourd’hui, les Français parlent au moins trois langages différents, au sens propre comme au figuré, selon qu’ils habitent à Paris, en banlieue ou en Province. Les Français n’ont plus la même approche du réel : il est construction injuste, révélation figée ou don abîmé.

Si tant est que nous prenions l’Élysée aujourd’hui, les sourds ne nous comprendraient pas. Et ils n’arriveraient pas à se faire comprendre, même en criant. Alors, ils pourraient prendre les armes, à cause de notre exemple.

N’était cette guerre civile en sursis, nous n’aurions pas les mêmes scrupules, mais force est de se résoudre à des actions printanières sans être estivales, tant que le réel n’aura pas repris ses droits, en particulier sur le langage. [3]

Qu’auraient fait nos saints et nos héros ? Il n’auraient cédé ni à l’ivresse dionysiaque ni à l’intempérante colère. Ils auraient préféré la l’Espérance grave et la forte paix.


[1« Imitatores mei estote, sicut et ego Christi », dit l’Apôtre aux Corinthiens (I. Cor. IV, 16), c’est-à-dire « Soyez mes imitateurs, comme je le suis moi-même du Christ ».

[2Nous avons eu la confirmation que le R&N était surveillé par la DCRI.

[3A cette fin, nous savons que de nombreux bourgeons « culturels » poindront dans les prochaines semaines. Nous ne manquerons pas de vous informer de ces beaux projets en temps voulu.

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