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« Vive le Roi ! Nous allons au paradis ! » : 220 ans de la bataille de Dol

Le vent de galerne, ce lugubre vent de noroit, balayait les côtes de la Manche en ce 22 novembre 1793, aux confins des provinces de Bretagne et de Normandie. La Vendée était sortie d’elle-même et errait sur les chemins, au nord de la Loire. Des bandes chouannes bretonnes s’étaient jointes à l’Armée catholique et royale de Monsieur Henri.
Défaite, elle s’en revenait de Granville dont les murailles, le fanatisme républicain des défenseurs et le feu ravageant les batisses adjacentes avaient eu raison du courage des Blancs. Les Vendéens, harassés par le chemin aller, durent s’en retourner chez eux, poussés par la faim, les maladies, le deuil. Fonçant vers le sud, il leur fallait prendre à nouveau les villes qu’ils avaient conquises précemment. Depuis Granville, tournant le dos aux flots déchainés de la mer, une cité se présentait aux regards des valeureux Vendéens : Dol-de-Bretagne, ci-devant siège d’évéché. Les Blancs occupèrent la ville. Les Bleus allaient les y rejoindre, dans l’espoir de tailler en pièce cette « race rebelle de brigands » [1].

Les Vendéens étaient vingt-cinq mille. Les Bleus, vingt-deux mille. Ces derniers étaient militaires de profession, au contraire des premiers, paysans en sabots et artisans, certes menés par quelques ci-devants, mais accompagnés de leurs familles : femmes, vieillards, enfants, tous civils, proies faciles pour les Républicains.
C’était la victoire ou la mort.

Laissons là la parole à Victoire de Donnissan, épouse du marquis de Lescure, plus tard connue sous le nom de marquise de La Rochejaquelein.

« Les prêtres exercèrent une bien plus grande influence encore. C’est la seule fois que je les ai vus fanatiser les soldats, comme le disaient les républicains, en employant tous les moyens de la religion pour les animer. Et je ne concevrais pas qu’on pût leur en faire un reproche puisque le massacre était certain, et que l’humanité exigeait leur zèle.

Pendant un instant où l’on faisait un peu de silence pour écouter le canon, le curé de Ste Marie de Rhé monta sur un tertre auprès de moi ; il éleva un grand crucifix, et d’une voix de Stentor, se mit à prêcher les Vendéens. Il était hors de lui- même, et parlait à la fois en prêtre et en militaire : il demanda aux soldats s’ils auraient bien l’infamie de livrer leurs femmes et leurs enfants au couteau des Bleus : il leur dit que le seul moyen de les sauver était de retourner au combat.
« Mes enfants, disait-il, je marcherai à votre tête, le crucifix à la main ; que ceux qui veulent me suivre se mettent à genoux, je leur donnerai l’absolution : s’ils meurent, ils iront en paradis ; mais les poltrons qui trahissent Dieu et qui abandonnent leurs familles, les bleus les égorgeront, et ils iront en enfer ».


C’est au cri de « Vive le Roi ! Nous allons au paradis ! » que s’élancèrent les Vendéens.
La victoire revint aux Blancs.
L’heure du grand massacre n’était pas encore venue. Pas encore… Trois semaines plus tard au Mans, puis le 23 décembre à Savenay, les cloches allaient toutefois sonner.
Ce n’était pas alors le Te Deum de la victoire qui naguère résonna en la cathédrale de Dol, mais le sinistre glas signifiant l’anéantissement d’un peuple en armes
.


[1selon le mot de Bertrand Barère (1755 - 1841), député à la Constituante, membre du Comité de salut public et rapporteur attitré de ce dernier

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