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De l’origine du drapeau provençal dit « ancien »

On ne le répétera jamais assez, la Provence et la Catalogne ont une longue histoire commune puisque la même famille a gouverné les deux « pays » pendant plus d’un siècle au Moyen-âge et que les liens fraternels nous rapprochant des Catalans ne se sont jamais vraiment éteints. Ne serait-ce que d’un point de vue vexillologique, on remarque une parenté entre les deux contrées. La seule différence entre les deux drapeaux est le sens des pals. En effet, sur la Senyera (nom du drapeau catalan), les rayures rouges sont horizontales car elles ont été couchées contre la hampe selon l’usage médiéval. Pour permettre une distinction, le drapeau provençal conserve quant à lui le sens du blason qui est, en réalité, commun à la Catalogne et à la Provence.
La naissance du blason « sang et or » ou « d’Or à quatre pals de Gueules » est, aujourd’hui encore, disputée entre Barcelonais et Provençaux. Pour expliquer son origine et déterminer la paternité de sa création, deux théories s’affrontent et bien entendu l’une est catalane quand l’autre est provençale.

Version catalane : La version catalane est bien plus romantique (puisqu’elle n’a pas de fondement historique) et mérite d’être relatée. Un Empereur français, probablement Charlemagne ou Charles le Chauve (son petit-fils) serait entré à l’issue d’une bataille dans la tente de l’un de ses plus vaillants chevaliers, blessé lors du combat : Wilfried le Velu, comte de Barcelone. L’Empereur découvrant son vassal mourant et voyant un écu d’or posé à son chevet aurait plongé sa main dans la blessure du Velu et aurait tracé quatre lignes de sang sur le bouclier en déclarant : « Devise obtenue par le sang doit s’écrire par le sang ! » La Maison de Barcelone ayant régné sur la Provence de 1112 [1] à 1245 aurait ainsi importé ses armoiries dans le Sud de la France et les Provençaux les auraient conservées par la suite. Cette explication ne manque pas de panache mais se voit aujourd’hui contestée.

Version provençale : En effet, les spécialistes actuels de l’héraldique, derrière Michel Pastoureau, contestent cette version et pensent au contraire que ces armes viennent de l’ancien royaume d’Arles. Elles auraient alors été créées dans le but de se distinguer de la croix de Toulouse (appelée aussi croix occitane ou croix des Bosonides), symbole de ceux qui à l’Ouest du Rhône avaient des prétentions sur la Provence [2]. Pour étayer leur propos, les héraldistes expliquent que le plus ancien sceau portant ces armoiries n’est pas catalan mais bien provençal et qu’il est conservé aux Archives Départementales des Bouches-du-Rhône. En régnant sur la Provence, les comtes de Barcelone auraient en réalité importé ses armes et les auraient léguées à tous les territoires sous leur domination : Catalogne, Aragon et Valence.

Cette fausse querelle sur l’origine du drapeau n’enlève rien à l’amitié profonde et historique qui réunit Catalans et Provençaux. Aussi, je voudrais terminer mon article par les mots de Frédéric Mistral qui, dans son poème La Coupo Santo devenu hymne provençal, écrivait :

« Pèr la glòri dóu terraire
Vautre enfin que sias counsènt.
Catalan, de liuen, o fraire,
Coumunien tóutis ensèn !
 » [3]


[1A cette date, la Provence est remise par mariage aux comtes de Toulouse et aux comtes de Barcelone qui se disputaient la mainmise sur la région. Ce n’est qu’en 1125 qu’un traité clarifia la situation établissant un marquisat de Provence au Nord de la Durance, sous domination toulousaine et un comté de Provence au Sud sous l’autorité de la Maison de Barcelone.

[2Ces deux blasons symbolisent encore aujourd’hui provençalistes et occitanistes.

[3« Pour la gloire du pays
Vous enfin qui êtes consentants nos alliés,
Catalans, de loin, ou frères,
Tous ensemble communions ! »

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