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Si j’en crois la sphère médiatique, les mass media d’autrefois, il existerait des réfractaires à l’ordre établi, qualifiés — depuis que Dominique Reynié [1] leur a trouvé un sobriquet — de « populistes ».
On ne va pas, ici, se voiler la face, ce mot de populiste à uniquement pour vocation de disqualifier l’adversaire, ainsi accusé de ne pas maîtriser avec brio la raison. Toute réserve envers la doxa renvoie à la nature bas de plafond de celui qui l’énonce : une vilaine personne « fermée » et « rabougrie » ; victime de désinformations. Si le gouvernement éclairé est en difficulté, c’est toujours qu’il a échoué à faire de la pédagogie, que son récepteur, le « rabougri », n’a pas su recevoir le bon message, sans quoi il aurait été converti, et aurait permis au gouvernement de réaliser les bonnes réformes.
Le populiste est toujours un « gaulois réfractaire », « un alphabète alcoolique », « un homme de rien », voire « un procureur », qui n’a pas la raison pour seul horizon. Mais derrière ce qualificatif de « populiste », on classe des personnalités qui n’ont parfois que peu de liens les unes avec les autres. Si je considère mon cas particulier – pour la démonstration – , je pourrais, pourquoi pas, être taxé de populiste, puisque je juge que l’immigration – ce fléau – a abîmé la France : avoir des réserves sur l’immigration vaut d’être qualifié de « rabougri » ; la principale caractéristique du « rabougri » étant justement d’être obsédé par l’immigration, de ne pas vibrer à l’évocation de l’Autre (prononcer « l’Ôtre »).
Pour autant, je ne me sens pas proche du polémiste Éric Zemmour, pour citer un exemple célèbre ; ses fantasmes de bonapartiste me sont absolument étrangers. Aurais-je quelque chose à voir avec Michel Onfray, un souverainiste sur le tard, dont je réfute la mayonnaise Nietzschéenne ? Il fut l’auteur jadis d’une diatribe « anti-croyants », s’appuyant entre autres sur des arguments péremptoires puisés chez Sigmund Freud, une idole qu’il a brûlée depuis. Le philosophe dénonçait, alors, à tout-va « les castrateurs » et « les anti-jouisseurs ».
Sans doute ai-je davantage d’affinités avec Alain Finkielkraut, Pierre Manent ou Rémi Brague, des gens, à mon sens, de bonne compagnie, classés au moins parmi les « réfractaires », de par leur statut de philosophe ou d’universitaire, ils échappent souvent au qualificatif infamant de « populiste » ; de préférence le « populiste » est peu diplômé. Je ne lis pas Philippe Murray et Jean-Claude Michéa, tous deux issus des rangs de la gauche, ni même Renaud Camus, ni encore la très sympathique Élisabeth Lévy, tous de célèbres « réfractaires ». Pourtant il faut bien le reconnaître, nos adversaires ont raison, il y a bien une unité à ce mouvement dit « populiste », « souverainiste », « néo-réactionnaire », ou « rabougri ». L’unité c’est l’opposition au libéralisme bon teint. Un libéralisme sans frein, mû par un principe féminin, qui ne reconnaît comme unique limite que l’alter-ego, dont seul compte le mérite ; c’est à dire un autre soi-même, dans lequel on se reflète à l’infini : l’étranger, l’homosexuel, le transgenre, la personne du sexe opposé, l’animal...
Par opposition nous incarnons, nous « les populistes », un principe masculin, celui de la limite, qui s’oppose à l’autre dans son hétérogénéité. Le « populiste » croit en l’être, croit qu’il est différent de l’autre. Ce qui lui vaut l’accusation d’essentialiste. Les conservateurs, qui aujourd’hui du côté de chez Les Républicains, par exemple, restent attachés au libéralisme économique mondialisé, trahissent les vraies valeurs traditionnelles : ils luttent contre un communisme fantoche, alors que l’ennemi est devenu libéral.
Notre programme commun, je crois, à nous les « rabougris », c’est la limite : limite à la fortune de Jeff Bezos ; limite à la numérisation ; limite aux réformes sociétales ; limite à la judiciarisation de la pensée ; limite à la parité obligatoire ; limite à l’avortement de confort ; limite à l’immigration ; limite aux Géants du Web ; limite au franglais ; limite au jeunisme ; limite au libertinage ; limite à la consommation et au matérialisme ; limite au positivisme ; limite au football ; à l’irénisme ; limite au narcissisme, si cher à M. Macron ; limite au Conseil de Défense ; limite aux très hauts salaires ; limite au relativisme ; limite au contrôle permanent ; aux identifiants et aux mots de passe ; limite à des principes devenus fous, déliés de la notion de Bien ; limite aux experts de l’expertise ; limite à l’idée contre-nature de l’Union Européenne ; limite entre le privé et le public...
Et c’est dans l’abolition de cette dernière limite, que se fonde l’abolition de toutes les autres limites. Elle renvoie à notre frontière sexuelle, à notre nature et notre finitude, à notre être singulier. Elle définit le soi et le non-soi. Il faut soutenir la thèse de Rémi Brague [2]. : « Avec notre siècle, la question fondamentale n’est donc plus celle du Bien et du Mal, ni non plus celle du Vrai et du Faux ; c’est celle de l’Être et du Néant ». Et si, en définitive, les « populistes » étaient les derniers à croire au minimum d’essence.
[1] Populisme : la pente fatale, Plon, 2011. Prix du livre politique 2012 et Prix des députés 2012
[2] Modérément Moderne, Flammarion, 2014
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