L’infolettre du R&N revient bientôt dans vos électroboîtes.
On observe depuis 2011 la multiplication dans les communes françaises de plantations appelées « arbre de la Laïcité », ainsi que d’autres, moins nombreuses, appelées « arbre du vivre-ensemble ».
Nous commencerons par étudier l’origine de ce rite républicain et ses liens avec la révolution française, avant d’en étudier l’idéologie et la symbolique. Ensuite nous regarderons quels sont les différents acteurs de ces cérémonies républicaines avant de conclure par un panorama des polémiques que ces plantations suscitent actuellement en France. Sans aller jusqu’à établir une carte de France de l’implantation de ces arbres ou chercher l’exhaustivité, nous utiliserons de nombreux exemples pour appuyer nos propos.
Dès 1790, des arbres, “symboles de la joie populaire”, sont plantés dans le Périgord et le Quercy après des soulèvements locaux. Ce n’est cependant qu’en 1792 que ces arbres de la Liberté se multiplient et que chaque commune est tenue d’en élever un en même temps qu’un autel à la Patrie. L’arbre révolutionnaire, appelé parfois arbre de la République devient ensuite un symbole et un “un monument national sacré” [1] et sera désormais protégé par des lois spécifiques.
Les citoyens qui osaient alors s’en prendre à ces arbres étaient sévèrement punis. Certains furent même condamnés à mort, comme à Toulouse où un homme ayant coupé un arbre de la liberté fut condamné à l’exécution capitale le 12 avril 1794 [2] ou dans le village de Bédoin qui fut le théâtre d’un sanglant épisode : « A la suite de la destruction d’un arbre de la liberté et des décrets de la Convention affichés sur un panneau devant la maison commune dans la nuit du 2 mai 1794, le tribunal révolutionnaire se transporte à Bédoin et prononce 66 condamnations à mort exécutées aussitôt par la guillotine. La population doit payer une nouvelle taxe révolutionnaire par habitant, les maisons sont incendiées, les terres agricoles stérilisées au sel, le village appelé "Bédoin l’infâme" est rayé de la carte, le reste des habitants déporté dans les villages voisins assigné à résidence. » [3]
La révolution passée, ces arbres seront alors arrachés ou replantés au gré de la Restauration, de la révolution de juillet 1830 puis de celle de février 1848 ou encore du coup d’État de décembre 1851... Beaucoup n’ont pas survécu jusqu’à nos jours, mais certains, comme celui de Bayeux, font désormais partie du patrimoine végétal des villes. Plus récemment, de nouveaux arbres de la Liberté furent plantés en 1989 à l’occasion du bicentenaire de la révolution française (certains, comme celui de La Guiche (71) ou de Berthenonville (27) furent abattus depuis, montrant par là que cette symbolique révolutionnaire continue de déranger).
C’est de cette tradition révolutionnaire et républicaine des « arbres de la Liberté » que s’inspirent les principaux initiateurs de ces nouveaux arbres sacrés, comme le déclarait en 2014 Daniel Keller, grand maître du Grand Orient de France [4].
Tout comme les arbres de la liberté sont une référence explicite à la révolution française, les arbres de la laïcité sont une commémoration de la loi de 1905 sur la séparation des églises et de l’État. Raison pour laquelle la plupart des nouvelles plantations ont lieu le 9 décembre, jour anniversaire de la loi, ou du moins dans les jours qui précèdent ou qui suivent.
La laïcité, en effet, est perçue comme un fondements de la République française, et le but de ces cérémonies républicaines d’inauguration d’un arbre est de « rappeler que la laïcité permet l’émancipation de chacun, la liberté de conscience, la stricte égalité des droits des citoyens, quelles que soient leurs origines et leurs appartenances politiques ou religieuses » ainsi que de préserver les principes fondamentaux de la république et particulièrement cette richesse qu’est « le bien vivre ensemble » [5].
Si certains arbres de la laïcité sont anciens et datent du centenaire de la loi de 1905, le véritable développement et la multiplication des cérémonies de ce type datent de 2011. En 2011, en effet, « le Sénat a choisi de célébrer la création de cette loi en instituant la Journée de la Laïcité chaque 9 décembre. Depuis cette date, des arbres sont plantés dans les espaces publics français pour commémorer cet aspect fondateur de notre société » [6].
Depuis cette date, les plantations se multiplient et touchent l’ensemble des départements. On peut noter par exemple qu’à Rouen, le 3 décembre 2011, a été planté un arbre de la laïcité, qu’après Boussy-Saint-Antoine qui avait réalisé une action similaire l’année précédente, une plantation eu lieu, le 8 décembre 2012 à Epinay-sous-Sénart.
Le 9 décembre 2012, dans les Landes furent ainsi plantés 16 arbres de la laïcité : Dax, Bougue, Tarnos, Castaignos souslens, Pouillon, Arue, Bélis, Bourriot Bergonce, Labastide d’Armagnac, Lencouacq, Losse, Maillères, Pouydesseaux, Sarbazan, Vielle Soubiran, Le Sen. De même à Bompas (66) le 14 juillet 2013 ; à Épinal (88) le 9 décembre 2013 ; à Tassin (69) le 11 avril 2014 ; à Rieupeyroux (12) en décembre 2014 ; à La Chapelle-de-Guinchay (71) en décembre 2014 avec l’ajout d’une plaque pour l’arbre de la laïcité ; à Pontpoint (60) ; ...
Les attentats de Janvier 2015 semblent avoir renforcé la volonté de multiplier ce type de plantations à forte symbolique républicaine et laïque (comme le montre une rapide recherche dans l’actualité). En avril 2015, suite aux attentats de janvier, la ville de Margny-lès-Compiègne (60) décidait par exemple de planter un arbre de la laïcité et de nommer la place de l’hôtel de ville “place de la Laïcité”. De même, la volonté de plantation en mars 2015 à Saint-Martin-des-Champs (29) pour les 110 ans de la loi de séparation des églises et de l’État d’un arbre qui « se veut le symbole de la clef de voûte de l’édifice républicain » a été d’après le maire amplifiée par les attentats de janvier. On remarquera par ailleurs que dans certaines villes, comme à Concarneau, des manifestations en hommage à Charlie ont eu comme point de rassemblement ces arbres de la laïcité (dans l’exemple donné ici, suite à l’appel lancé par la Ligue des Droits de l’Homme et l’Amicale Laïque de Concarneau).
Si le rite de plantation n’a pas (pas encore ?) de cérémonial précis, le type d’arbre utilisé n’est pas non plus fixé et ne semble dépendre ni des régions ni des périodes de l’année à laquelle ils sont plantés.
L’espèce la plus couramment utilisés semble être le ginko biloba, dit l’arbre aux quarante écus. On le retrouve par exemple à Olemp (Aveyron), à Rodez (Aveyron), au Havre (Seine-Maritime), à Antully (Saône-et-Loire), à Bram (Aude), à Caunes-Minervois (Aude), à Clessé (Deux-Sèvres), à Cognac (Charente), à La Couronne (Charente), ...
Le gingko biloba qui est l’« un des plus vieux sur terre (il serait apparu il y a plus de 270 millions d’années), est aussi d’une essence très résistante. De plus, les deux lobes de sa feuille représentent bien les deux sphères, privée et publique » [7]. Le Gingko Biloba a été choisi car il incarne la résistance et la persévérance notamment du fait qu’il fut le seule arbre à avoir résisté à Hiroshima.
On observe aussi le choix de tilleul comme à Manzac (Dordogne), à Muret (Haute-Garonne), à Saint-Martin-des-Champs (Finistère), à La Bresse (Vosges), à Longny-au-Perche (Orne), ... Parfois un Olivier (symbole de paix) est préféré, comme à Bagnols (Gard), à Trausse (Aude), ou a Bompas (Pyrénées-Orientales), ... ou bien encore un chêne vert comme à Margny-lès-Compiègne (Oise), à Angers (Maine-et-Loire) pour la 2e arbre planté en remplacement du premier décapité, à Badens (Aude), à Haybes (Ardennes), ... Il serait trop long de lister ici toutes les variantes arboricoles utilisées.
Moins fréquente, mais pas forcément moins ancienne, on observe aussi la plantation d’« arbres du vivre-ensemble ».
En 2011, fut organisé à Épernay (Marne) un forum associatif au cour duquel furent prononcé des vœux sur l’Arbre du vivre ensemble. En octobre 2012, à Dol-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine), un arbre du vivre ensemble fut installé dans le hall d’un collège. Dans l’Allier, à Lurcy-Lévis, les habitants furent conviés à la plantation d’un arbre du vivre ensemble (entre 2013 et 2014, la date précise n’étant pas indiquée). De même à Poitiers (Vienne) en mars 2015 ; ainsi qu’à Bagnols (Gard), en juin 2015.
Une autre plantation d’arbre du vivre-ensemble, dont la date exacte n’est pas indiquée, eut lieu à Mably (Loire), mais le site de la ville explique en détails le pourquoi de cet arbre tout en le reliant clairement au principe de la laïcité ; notion développée dans le discours tenu par l’un des représentants des associations laïque à l’origine de la plantation de l’arbre : « Liberté de pensée, d’expression, de communication, d’action dans le respect des autres. Égalité devant la loi que l’on soit puissant ou démuni. Fraternité devant l’adversité, la misère et rempart contre les discriminations. Trois richesses qui rendent notre laïcité valeur universelle autour du “Vivre ensemble” ».
Un élément frappant qui ressort des différents articles de presse consacrés à ces cérémonies laïques est l’implication de plus en plus fréquentes de jeunes enfants, soit que les arbres soient directement plantés dans les écoles, les collèges et les lycées, soit que les cérémonies organisées par la ville en dehors des établissements incluent la préparation et la participation d’élèves des établissements locaux.
On peut alors classer ces cérémonies en trois catégories :
Indépendamment du public présent (simples citoyens, élèves de l’école, parents, enseignants, personnel des services municipaux, ...), il nous faut maintenant nous pencher sur deux questions : qui est à l’origine de ces plantations ? Et qui sont les personnes les plus présentes autours des élus lors de ces cérémonies ?
Les réponses à ces deux questions semblent se confondre et il nous faut par ailleurs noter que généralement la présence des différentes associations à l’origine ou participant aux plantations sont rapportées par les médias, ces groupes militants ne faisant bien souvent pas mystère d’être à l’origine de ces cérémonies.
Nous ne reviendrons pas sur la présence régulière des enseignants et représentants de l’éducation nationale lorsque ces arbres sont plantés dans des écoles ou en présence d’élèves (ce fut le cas, par exemple, à Parfouru-sur-Odon (14) où les Délégués Départementaux de l’Éducation Nationale prirent l’initiative de cette plantation).
Le premier groupe très largement présent lors des plantations des « arbres de la Laïcité » est constitué des différentes loges maçonniques. Et en premier lieu le Grand Orient de France dont le grand maître, Daniel Keller, revendique l’attachement de son organisation à ces cérémonies [8].
Représenté quasiment systématiquement, le Grand Orient de France est par exemple impliqué dans les plantations d’arbre de la laïcité à La Couronne (Charente), à Saint-Étienne (Loire), à Aureilhan (Hautes-Pyrénées), à Boussy-Saint-Antoine (Essonne), à Epinay-sous-Sénart (Essonne), ...
On trouvera par ailleurs sur le site du Grand Orient le programme des précédentes journées de la laïcité ainsi que les nombreuses plantations soutenues ces jours là (2011, 2012, 2013, 2014).
Plusieurs autres loges sont bien souvent présentes, comme à Bous (Essonne) ou le Parisien titrait par ailleurs : « Les francs-maçons plantent l’arbre de la laïcité » et indique que « Les francs-maçons proposeront chaque année aux communes du Val d’Yerres la même démarche ». La plantation du Havre est elle aussi par exemple a l’initiative de plusieurs loges maçonniques, et fut inaugurée par le maire de la ville avec, à ses côtés, le conseiller de l’Ordre du Grand Orient pour la région Ouest. Tout comme à Angers, où, planté en présence d’un grand maitre du Grand Orient de France, l’arbre fut peu après coupé et accompagné d’un tag rouge : « A quand la séparation entre la FM et l’Etat ? »
Association aussi très régulièrement présente lors de ces plantations (comme le montre par ailleurs la fréquence à laquelle leur nom est indiqués sur le programme des évènements organisés par le Grand Orient sur le site internet de celui-ci), la “Ligue de l’Enseignement” a participé par exemple aux plantations de Mably (Loire), de Roanne (Loire) ou encore de Champhol (Eure-et-Loir) (09/12/2014), ...
On trouve aussi présentes quantité d’associations laïques diverses qu’il serait trop fastidieux de toutes lister ici.
On notera par exemple que l’“arbre de la laïcité” de Mâcon (Saône-et-Loire) fut préparé par la DDEN (fédération des délégués départementaux de l’éducation nationale) avec La ligue des droits de l’homme, la ligue de l’enseignement et l’UFAL (Union des familles laïques). A Mably (Loire) on note la présence de “Solidarité Laïque”, à Concarneau (Finistère), celle de “l’amicale laïque”, à Rouen (Seine-Maritime), du “comité départemental d’action laïque de Seine-Maritime”.
La presse parfois ne précise pas et parle simplement “d’autres associations de défense de la laïcité et des droits de l’homme”, ou évoque un “collectif laïque audois”, la “Fédération des œuvres laïques de la Moselle” ainsi qu’une association “les Profanes”, un “collectif Francis Texier”, la “libre pensée” (comme à La Couronne), ... “Libre pensée” régulièrement présente aussi, comme par exemple à L’Isle-Jourdain (Gers) à travers la “Fédération départementale de la Libre-pensée”.
Au delà d’une simple symbolique républicaine, la multiplication des arbres de la laïcité est symptomatique à la fois d’une crispation très nette sur la gestion religieuse (principalement du fait de l’islamisation revendicative en France) et d’une laïcité de plus en plus agressive, pour ne pas dire intégriste.
Pourquoi faut-il planter des arbres de la laïcité ? Tout d’abord la référence à la révolution française revient fréquemment (« L’ancrage de la laïcité dans notre société comme on planta après 1789 les arbres de la Liberté » [9]). Ensuite ces arbres sont nécessaires pour rappeler que la laïcité est un « principe d’une valeur héritée des Lumières » [10], car « Le 9 décembre, était le jour anniversaire de la loi de la séparation de l’Église et de l’État, votée en 1905 », car La laïcité est fondamentale à l’école, « lieu de savoirs, d’apprentissage et du vivre ensemble » [11].
L’académie de Toulouse, dans un actualité consacré à ce sujet sujet [12], rappelle un extrait d’un discours de Jean Jaurès de 1904 sur « l’école laïque qui doit devenir la libératrice des cerveaux et l’éducatrice des consciences » et explique que « les frondaisons de l’arbre sont constituées des dizaines de mains des élèves et des étudiants , symbolisant pour eux la diversité et l’identité de chacun que permet la Laïcité dans le respect de ses principes énoncés dans les 15 articles de la Charte de la Laïcité, gravés sur des plaques de couleurs ».
Tandis qu’a Clessé (Saône-et-Loire), l’inspectrice de l’Éducation Nationale félicite les enseignants « qui doivent former des citoyens qui raisonnent plutôt que des citoyens qui croient », Mme la Ministre Sylvia Pinel écrit aux enseignants de la commune de Grisolles (Tarn-et-Garonne) à occasion de la journée de la laïcité pour rappeler que celle-ci est « une valeur fondatrice de notre République », « un combat pour la tolérance, le progrès et le respect » et une « leçon de tolérance, d’ouverture aux autres, mais aussi de lutte contre l’obscurantisme et le communautarisme ». Elle invoque « l’impératif de strict délimitation entre la sphère publique totalement neutre et la sphère privée où peut s’exprimer la liberté des individus », une « laïcité républicaine », faisant alors référence aux lumières, à Voltaire, à Clemenceau pour conclure que c’est bien la laïcité qui « fonde les valeurs essentiels de notre république » [13]. A la lecture des différents discours et écrits des représentants du gouvernement et de l’Éducation Nationale, il semble que celle-ci soit toujours persuadé qu’il existe un divorce entre foi et raison et que fides et ratio sont incompatibles...
Une autre valeur régulièrement convoquée dans les discours est celle du « vivre-ensemble ». C’est le cas par exemple à Antully (71), à La Couronne (Charente), à Margny-lès-Compiègne (Oise) ou la place rebaptisée place de la laïcité « représente la France dans sa diversité culturelle et prône le vivre ensemble », ...
Cette laïcité est « fondement de la République », « Une clé du vivre ensemble », « Un symbole fort, un fondement du pacte républicain » [14], un « bien précieux » [15]. Car « quelles que soient nos croyances et nos différences, nous devons accepter de vivre ensemble » [16]. Car en plus de la Laïcité, cet arbre « revêt une hauteur symbolique comme la valeur du bien vivre ensemble, de la paix et de la tolérance » [17].
Les revendications diverses et variées qui se cachent derrières ces arbres laissent parfois la place au comique, comme dans cet article du mois de juin où l’Union des familles laïques (Ufal) va même jusqu’à regretter lors d’une de ces célébrations que l’on n’ait planté qu’un « arbre du vivre ensemble » et non un « arbre de la laïcité », tout comme l’Amicale laïque, qui, elle, regrette que les religions aient été invités à s’exprimer sur la laïcité lors d’une réunion se tenant la même journée (montrant ici de manière incidente l’intégrisme laïc voulant interdire aux religion de s’exprimer sur ces thèmes).
Parfois l’inauguration de l’arbre de la laïcité donne lieu à un joyeux mélange, dont le seul point commun semble d’être d’illustrer combien toutes les associations néfastes travaillent ensemble vers le même but. Ainsi en octobre 2014 au collège de Châteauneuf-sur-Sarthe (49) la semaine fut consacrée, en plus de la plantation de l’arbre, à une « exposition sur la laïcité au réfectoire », tandis que « le planning familial a passé quelque temps avec les 4e qui ont vu un film proposé par l’association Mémoire d’immigration ». Plus tard les élèves ont pu rencontrer L’ONG Amnesty international avant de terminer la semaine par une rencontre avec professeurs, infirmières et conseiller principaux d’éducation (CPE) autour du thème « Media et sexualité ».
L’utilisation de la majuscule (Laïcité) qui comme dans l’antiquité vise à diviniser certaines valeurs comme divinités allégoriques (tels Honos, Virtus ou Victoria à Rome), fait immédiatement penser à l’autel de la Patrie et au Temple de la Raison ainsi qu’au culte de la Raison et de l’Être suprême de l’ère révolutionnaire.
Tout comme on observe pour la République (avec une majuscule, symbole de son caractère indépassable) la volonté de sacralisation d’un régime politique, la Laïcité est en train de devenir l’étendard que fut la Liberté lors de la révolution française. Et cette triple référence aux lumières, à la révolution française, et à la loi de “séparation de l’église et de l’état” de 1905, ainsi que l’emploi de certains mots religieux (« honorer la Laïcité », « rituel », « profanation ») indiquent que la laïcité est bien en train de devenir une véritable religion avec ses rites (plantation d’arbres, marches, plaques de commémoration, ...) ses sacrements (baptême républicain, mariage laïc, volonté d’introduire des funérailles laïques, ... ), ses dogmes (tolérance, vivre-ensemble, acceptation de toutes les différences, ...) et ses divinités (Liberté, Laïcité, Fraternité, ...), ses fêtes (le Grand Orient souhaitant instaurer une journée nationale de la laïcité le 9 décembre), et la multiplication des arbres de la laïcité un peu partout en France...
La multiplication des revendications de ces associations laïques diverses et des instances franc-maçonnes montrent qu’il y a actuellement une offensive laïque contre les autres religions. Le combat ici n’est pas une juste place pour toutes les religions, mais de réussir à imposer, progressivement la laïcité comme seule et unique religion (comme le montre par exemple la volonté de « Donner un temps d’antenne sur les chaines publiques de télévision aux mouvements philosophiques non-confessionnels, et aux courants de pensée laïques, libres penseurs, athées »).
Il est par ailleurs symptomatique de voir que ceux qui sont tout d’abord visés par ces mesures et par ces propositions nouvelles ne sont pas les mouvements islamiques, mais bien les catholiques. Qu’il s’agisse en effet du Grand Orient de France (GODF), de la Ligue de l’Enseignement (dans un autre discours qui n’aurait rien à envier à certaines théories du complot, la Ligue de l’enseignement allait même jusqu’à parler d’ « attaque insidieuse »), ou encore de la “libre pensée”, c’est systématiquement les « véritables provocations » de ceux qui veulent installer des crèches dans les bâtiments publics qui sont dénoncées, ainsi qu’un certain “obscurantisme” (sic) et un “intégrisme catholique” (re-sic).
Si l’on a surtout entendu parler de l’arbre de la laïcité d’Angers, nombreux sont ceux qui furent “vandalisés”, déracinés ou tout simplement sciés un peu partout en France :
Qui en sont les auteurs ? Pour Libération ils ’agit d’activistes anonymes qui défendent une France « catholique » et ciblent la « franc-maçonnerie ». Pour Daniel Keller, grand maître du Grand Orient de France, il s’agit « d’une frange extrémiste et ultra-minoritaire ». Pour le président de l’amicale laïque, il s’agit de la « mouvance catholique traditionaliste ». Et tous d’enchainer les imprécations...
S’agit-il d’évènements graves ? Au vu des réactions politiques oui ; à telle point qu’il est permis de se demander si l’on assiste pas à un retour de certains “arbres sacrés” et si vandaliser un arbre de la laïcité ne devient pas un sacrilège plus grave que de vandaliser un lieu de culte chrétien ou de profaner un cimetière. « On replantera, autant de fois que nécessaire », martèle Marie-Christine Damian-Gautron, présidente du comité. « La République doit gagner contre les délinquants et les factieux » s’énerve Romain Colas, maire PS de Boussy-Saint-Antoine, tandis qu’Alain Tourret, député du Calvados, présentant la laïcité comme une innocente victime, dénonce « la bêtise obscurantiste » et une « profanation » signe de la « montée des extrémismes » et de la multiplication « des atteintes à la laïcité et des actes d’hostilité aux symboles républicains ».
C’est pourquoi il appelle à ce que les auteurs de tels actes soient « poursuivis et châtiés avec la sévérité qui convient » ; qu’à Metz, on dénonçait « un acte fanatique dirigé contre la laïcité » et que Fréderic Béatse, alors maire d’Angers appelait à ce que « les ennemis de la République sachent qu’ils ont face à eux un front uni » : « Ce chêne vert planté par moi il y a un an avait une très forte portée symbolique et disposait à son pied d’une plaque présentant la laïcité comme une des valeurs intangibles de notre République. [...] La République ne se négocie pas et ne se laisse pas ainsi attaquer sans réponse. [...] ».
[2] Conseil Département de la Haute-Garonne, Archives Départementales, « Arbres de la liberté en Haute-Garonne ».
[3] Direction régionale des affaires culturelles Provence-Alpes-Côte d’Azur, « Monument aux victimes de la Révolution, Bédoin, Vaucluse ».
[4] Libération, « Qui en veut aux arbres de la laïcité ? », 06/02/2014.
[5] La Dépêche, « L’arbre de la laïcité dans la cour de l’école », 16/12/2014.
[6] Essonne Info, « La Laïcité mise à l’honneur à Saintry-sur-Seine », 10/12/2012.
[7] Midi Libre, « Un ginkgo biloba, symbole de la laïcité, planté dans la cour de l’école de Saint-Sébastien », 11/12/2013.
[8] Libération, « Qui en veut aux arbres de la laïcité ? », 06/02/2014.
[9] Le Journal de Saône-et-Loire, « Clessé : L’arbre de la laïcité planté à l’école », 11/12/2014.
[10] Charente Libre, « Un arbre symbolisant la laïcité planté au square », 17/12/2012.
[11] Académie de Toulouse, « Laïcité 2014, laisse une trace », 12/12/2014.
[12] Académie de Toulouse, « Laïcité 2014, laisse une trace », 12/12/2014.
[13] Académie de Toulouse, Lettre de Madame Le Ministre Sylvia Pinel, 08/12/2014.
[14] Actu 88, « L’arbre de la laïcité est planté à Épinal », 09/12/2013.
[15] La Dépêche, « L’arbre de la Laïcité : bien plus qu’un symbole… », 17/12/2010.
[16] La Dépêche, « Estantens : l’arbre de la laïcité est un tilleul », 11/12/2014.
[17] Essonne Info, « La Laïcité mise à l’honneur à Saintry-sur-Seine », 10/12/2012.
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