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R&N : L’université d’été de la Sainte Baume aura cette année pour thème central l’identité. Portera-t-elle uniquement sur le concept d’identité ou s’attachera-t-elle aussi à définir ce qu’est l’identité catholique et française ?
Père Guitton : Il état important pour nous de ne pas s’enfermer dans une vision restrictive de ce thème en abordant uniquement la question de l’identité française. En réalité, cette notion analogique a des racines bien plus profondes. Ce n’est pas un hasard si saint Jean-Paul II a souligné la centralité de la question anthropologique : comment affronter les défis actuels si l’on ignore l’identité et la vocation de la personne humaine ? Il appartient à l’Église que d’annoncer la vérité sur l’homme. De plus, il y a un ordre de priorité : la « question française », pour importante qu’elle soit, n’est pas première. Quel est cet homme ? Quelle est sa famille ? Quelle est sa foi ? Quelle est sa culture ? S’il est chrétien, quelle est son identité politique ? Y a-t-il une identité européenne ?... Ce qui n’a pas empêché le même Jean-Paul II d’écrire des pages magnifiques sur son attachement à sa patrie dans l’un de ses derniers ouvrages : « Mémoire et identité. » Il est aussi important de pouvoir parler des relations entre violence et identité religieuse.
R&N : Pourquoi le questionnement identitaire est-il actuellement si grand en France ?
Père Guitton : La question identitaire est certainement d’actualité en France. Encore faut-il bien poser le problème. Si l’on en reste à certains slogans réducteurs, on risque de tomber dans des polémiques stériles. Mais il est bien sûr légitime de s’interroger sur ses propres racines : quand on ignore d’où l’on vient, on a du mal à savoir où l’on va. Le Catéchisme de L’Église catholique place les rapports que l’on doit entretenir avec son pays dans le 4° commandement : « Tu honoreras ton père et ta mère. » Est-ce que j’entretiens des rapports de piété filiale vis-à-vis de ma patrie ? Comme dans bien des domaines il y a eu un travail de déconstruction et de culpabilisation en France. A tel point que poser la question de l’identité nationale est devenu délicat. Ce n’est pas en l’évitant qu’on apaisera les tensions.
R&N : Pour certains français, le christianisme est plus un vernis identitaire à défendre qu’une foi et une pratique religieuse. N’y-a-t-il pas ici un danger pour la foi chrétienne ?
Père Guitton : Le mot « identitaire » est devenu douteux, en partie par l’utilisation malheureuse qu’en font certains groupes nationalistes. On recourt alors à la foi chrétienne, non comme une source toujours vivante, mais comme faire-valoir de certaines convictions politiques : c’est la réappropriation, parfois violente, d’une identité idéalisée. Il est urgent de se rappeler sans complexe ce que notre histoire et notre culture doivent à la foi chrétienne, sans tomber dans un « athéisme catholique », qui ne serait même plus chrétien. Conscient de ce que je suis, je deviens capable de dialoguer et d’accueillir celui qui n’a pas les mêmes racines. Un pays n’est jamais « un produit fini », froid et monolithique.
R&N : Des élus Socialistes, Républicains et Écologistes viendront débattre à l’université d’été. L’absence d’élu Front National sur ce thème de l’identité est-il un choix volontaire ?
Père Guitton : Il n’y a pas de parti pris dans ce choix. Chaque année, nous essayons d’inviter des personnes engagées dans différents partis et qui revendiquent leur foi chrétienne. La table-ronde doit avoir une certaine représentativité, mais aussi permettre des échanges apaisés. Malheureusement, le fait de savoir s’il y a ou non des élus FN dans un débat est devenu un critère pour certains. En bien ou en mal d’ailleurs… Nous ne voulons pas nous soumettre à ces impératifs médiatiques. L’an dernier, nous avons été des héros pour les uns, des traîtres pour les autres. Notre logique est différente. L’Eglise est capable de dialoguer avec tout le monde.
R&N : La question de l’identité sera l’un des thèmes principaux de l’élection présidentielle de 2017. Comment cette université d’été a-t-elle vocation à influencer le débat politique sur ce thème ?
Père Guitton : Sur cette question, nous devons pouvoir montrer qu’il y a moyen de l’aborder de façon apaisée. Un travail de définition et de clarification est nécessaire. Les mots que nous utilisons sont souvent piégés. Ce n’est pas une raison suffisante pour esquiver ces grands débats. Les chrétiens y prennent légitimement part : plus conscients de la nécessité de l’engagement politique, ils ont besoin de lieux où ils puissent se retrouver et échanger, indépendamment des rivalités partisanes. C’est l’ambition des ces Universités d’été. La politique est une « diaconie » du bien commun, où les chrétiens seront des témoins d’autant plus crédibles qu’ils seront cohérents.
R&N : Quel est le public visé par cette UE ?
Père Guitton : Les Universités s’adressent aux jeunes actifs, désireux de s’investir en politique au sens large. Plus généralement aux chrétiens qui souhaitent s’engager dans la société, en demeurant fidèles à leur foi et à leurs racines. La nouvelle évangélisation passe par la présence décomplexée des chrétiens dans tous ces « aréopages ».
R&N : Pouvez-vous rappeler à nos lecteurs les informations pratiques pour s’y rendre ?
Père Guitton : Les universités se déroulent du 24 au 27 août à la Sainte Baume, dans le diocèse de Toulon, au-dessus de Marseille. On peut s’inscrire directement sur le site universite-ete.com. Plusieurs forfaits sont proposés, qui couvrent tous les frais de la session, à partir de 190€. On peut aussi venir pour une soirée, une conférence ou une rencontre… sans participer à tout le séjour. Je pense par exemple à la soirée sur les chrétiens d’Orient vendredi 26, avec le témoignage exceptionnel de Pierre Le Corf, seul français présent à Alep depuis 4 mois, ou à la table-ronde du samedi matin avec le député de la Martinique, Bruno Nestor Azerot !
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