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Jean-Frédéric Poisson : « la domination territoriale de l’islam ne représente en France pour le moment qu’une petite partie du territoire, même si elle est par ailleurs spectaculaire »

Président du Parti chrétien démocrate (PCD) et ancien député, Jean-Frédéric Poisson vient de publier L’islam à la conquête de l’Occident (Éditions du Rocher, novembre 2018) dans lequel il analyse un document stratégique adopté à l’unanimité par les États musulmans il y a dix-huit ans, à l’automne 2000. Ce document décrit dans le détail la manière dont procèdent, aujourd’hui encore, les États musulmans pour installer à la place de la société occidentale déclinante une « civilisation de substitution », l’islam, seule religion susceptible de rendre les hommes heureux. Il a bien voulu répondre aux questions du Rouge & le Noir.

R&N : Après avoir été longtemps niée ou minorée, l’islamisation de la France est désormais admise par la plupart des politiques et médias. Est-ce une bonne nouvelle ?

Jean-Frédéric Poisson : Oui c’est une bonne nouvelle, même s’il faut encore s’entendre sur ce que signifie le mot « islamisation ». D’un côté, il y a une conscience claire de la progression de l’islam, à la fois comme pratique religieuse et comme système social, dans certains territoires français – et de tous les problèmes qu’une telle progression pose. D’un autre côté, alors que ce phénomène est identifié, ni son ampleur, ni ses causes ne semblent faire aujourd’hui l’objet d’un consensus. En particulier sous deux aspects qui constituent l’objet de mon livre : une réelle volonté de domination sans partage de l’islam sur le reste du monde, et la contribution énergique des États musulmans à la réalisation de ce plan.

R&N : Votre livre met les pieds dans le plat d’un aspect encore peu reconnu ou accepté : cette islamisation n’est pas seulement le fruit d’une somme de comportements individuels mais est organisée. Quel est ce document intitulé « Stratégie de l’action culturelle islamique à l’extérieur du monde islamique » sur lequel vous basez vos affirmations ?

Jean-Frédéric Poisson : Au début des années 80, les états musulmans décident de structurer leurs actions culturelles, une dizaine d’années après avoir structuré leurs actions politiques au sein de l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI). Le premier de leurs constats les inquiète : l’attrait que représente la civilisation occidentale, fragilise le monde musulman, particulièrement parce que les communautés musulmanes occidentales ne sont plus en situation de transmettre l’intégrité du message islamique aux générations suivantes. Cette situation est insupportable pour l’islam, parce que celui-ci repose en particulier sur trois convictions. La première est que l’islam a vocation à dominer le monde puisqu’il est la religion naturelle de l’homme. La seconde est que cette domination doit être l’objectif premier de tout musulman, où qu’il vive. La troisième est que seule l’Oumma, c’est-à-dire la communauté des croyants, et sa solidité peuvent permettre de réaliser ce but.

Le document que je commente n’est ni plus ni moins que le plan d’action très concret qui doit permettre aux musulmans occidentaux de s’inscrire dans la démarche de domination de l’islam sur le monde. Ce document a été adopté en 2000, à l’unanimité des 57 états membres de l’Organisation de la Coopération Islamique. Il a été rédigé avec la contribution de très nombreux responsables culturels, religieux, intellectuels, issus des communautés musulmanes occidentales. Il a, dans son esprit comme dans sa lettre, très inspiré ce que publient habituellement les Frères musulmans sur ce sujet.

R&N : L’Occident serait donc décadent si l’on en croit ce document ?

Jean-Frédéric Poisson : Du point de vue de l’islam, toute société qui n’est pas islamique est décadente ! Plus profondément, un des intérêts que représente ce document de planification stratégique est qu’il fournit un inventaire très détaillé de la manière dont les musulmans regardent l’Occident. Que nous disent-ils ? Qu’un musulman ne sait pas vivre dans une société où on laisse les enfants consommer de la pornographie et de la drogue, où des institutions sont sans cesse bafouées, où l’autorité parentale n’a plus de valeur, où l’on ne fait plus aucune différence entre le bien et le mal, où l’on ne punit pas les criminels, où l’on veut absolument éradiquer toute expression religieuse de la vie publique, où tout est susceptible de devenir demain un objet de commerce, y compris les bébés qui le sont d’ailleurs déjà. Du point de vue islamique, ces différents aspects de notre vie sociale constituent clairement une décadence. Il est d’ailleurs très difficile de ne pas en être d’accord.

R&N : Quelle sont les différents piliers de cette stratégie d’islamisation lente de l’Occident ? Les « accommodements raisonnables » pris par nombre de pays depuis 20 ans correspondent-ils à cette stratégie prônée par l’Organisation de la Coopération Islamique ?

Jean-Frédéric Poisson : Il y a 5 piliers.

  • Le premier pilier est le ré-enracinement dans la foi et la tradition islamiques : le Coran, la Sunna, et la sîra (biographie de Mahomet).
  • Le deuxième pilier est la force de la communauté : l’Oumma nourrit et protège chaque musulman, et c’est tant d’elle qu’il doit trouver ses forces pour propager une bonne image de l’islam.
  • Le troisième pilier est l’action sociale. Elle doit se déployer dans tous les domaines de la vie personnelle quotidienne : le soutien aux familles et à la jeunesse, le soutien aux femmes, la création d’écoles, de centres culturels, de mosquées, la solidarité sociale, partout où l’islam doit prouver qu’il est tout aussi efficace que l’Occident. C’est action quotidienne concrète a un double objectif : d’abord elle vient en aide aux membres de la communauté musulmane ; mais en plus elle assure, par son efficacité, une promotion formidable de l’image de l’islam en Occident. Elle participe de ce fait à la conquête de l’Occident par l’islam.
  • Le quatrième pilier est linguistique : il est clairement identifié dans le document adoptée en 2000 par les États musulmans que l’exigence de l’enseignement de la langue arabe dans les écoles primaires occidentales est un des leviers majeurs du plan stratégique. La raison est évidente : du fait que la révélation du Coran s’est faite en langue arabe (c’est en tout cas ce que dit l’histoire de l’islam), il est impensable de prétendre solidifier les communautés musulmanes occidentales puis assurer l’extension de la charia, sans que l’enseignement de l’arabe soit généralisé à ces communautés.
  • Le cinquième pilier est la formation des musulmans eux-mêmes dont beaucoup ne connaissent pas suffisamment la tradition islamique pour la transmettre. Cet enjeu de transmission, de généralisation du message, est également un des points centraux de ce plan stratégique.

R&N : Ce document est pourtant public. Comment expliquer l’absence de réaction des élites politiques occidentales face à cette islamisation ? Celles-ci n’ont-elles pas compris ou pris en compte la nature globale de l’islam qui forme « une religion, une culture et une civilisation » ?

Jean-Frédéric Poisson : Le silence des politiques sur ce sujet s’explique d’abord par l’ignorance. Comprendre l’islam demande du temps, d’autant plus que cette civilisation et le projet politique qui en découle, sont assez radicalement opposés au nôtre. Qui prend le temps de comprendre la densité des enjeux représentés par ces deux civilisations qui se confrontent ? Et qui en tire toutes les conséquences politiques ? Ce silence s’explique également par la lâcheté face à une lecture gauchère et multiculturelle de l’histoire de France qui persiste à vouloir considérer l’islam comme une doctrine amie.

R&N : Où en sommes-nous de l’application du plan d’action présenté dans ce document ? Avons-nous encore le temps de réagir ?

Jean-Frédéric Poisson : La mise en œuvre de ce plan est relativement bien avancée puisque nous avons vu émerger en France ces dernières années tous les projets préconisés dans la planification stratégique des Etats musulmans y compris, ce qui me laisse pantois, l’enseignement de la langue arabe dès l’école !
Il est encore temps de réagir bien sûr. D’abord parce que la domination territoriale de l’islam ne représente en France pour le moment qu’une petite partie du territoire, même si elle est par ailleurs spectaculaire. Il n’est jamais trop tard pour rappeler les exigences de la loi française et que les autorités publiques se réapproprient leur mission de respect de l’ordre public. Jamais trop tard pour que l’héritage des civilisations européennes et françaises soit transmis aux générations futures. Jamais trop tard pour rappeler à l’ensemble du peuple français que, s’il n’est pas illégal de réserver des horaires de piscine aux femmes, une telle disposition contrevient en revanche très gravement à l’esprit de nos institutions et à notre mode de vie sociale. Il n’est pas trop tard non plus pour réinstaller des éléments essentiels de la politique familiale, authentique soutien à la natalité. Jamais trop tard pour prendre des dispositions indispensables que j’ai d’ailleurs défendues pendant la campagne de la Primaire de la droite et du centre, il y a deux ans : contrôler les flux migratoires et suspendre l’application du droit du sol en vue de l’acquisition de la nationalité française.
Au-delà de tous ces éléments, il reste que le cœur du sujet est la conscience que les occidentaux ont de l’obligation qu’ils ont de transmettre leur civilisation, c’est-à-dire d’enseigner aux générations futures ce qu’est le mode chrétien de l’organisation sociale. Là où le christianisme recule, l’islam s’installe : c’est une constante historique, dont tous les peuples occidentaux devrait être davantage conscients.

R&N : L’Europe est (re)devenue un territoire de conquête pour l’islam. L’’histoire se répète, a-t-on envie de dire. La situation de l’Europe doit-elle conduire à remettre en cause une partie de la politique étrangère de la France, vis à vis de pays comme l’Arabie Saoudite par exemple ?

Jean-Frédéric Poisson : Nous sommes à l’égard du monde musulman proche-oriental et nord-africain d’une naïveté et d’une lâcheté indignes. Il y a certainement peu d’exemples dans l’histoire de l’humanité, montrant une organisation internationale d’États expliquer à d’autres Etats qu’elle va les conquérir, leur imposer sa propre civilisation et son mode de vie. Malgré cette déclaration, qui est une authentique déclaration de guerre, nous continuons à considérer ces différents pays comme des amis ! A l’évidence, l’existence du document stratégique des Etats musulmans devrait nous conduire à revoir de fond en comble nos politiques d’alliance avec les différents pays signataires. J’avais proposé cette révision au moment de la campagne présidentielle. On ne peut pas dire que cette révision soit une obsession du pouvoir actuel qui se couche devant l’Arabie Saoudite et la Turquie avec une célérité inédite !…

R&N : On parle depuis plus de 10 ans de la mise en place d’un “islam de France”, de “moderniser l’islam”, est-ce cohérent avec la notion d’Oumma ? Emmanuel Macron envisage par ailleurs d’amender la loi de 1905 pour « réduire l’influence étrangère ». Qu’en pensez-vous ? Que faire dès lors des populations de religion musulmane présentent sur le sol français ? Entre la partition et la remigration, d’autres voies sont elles possibles ?

Jean-Frédéric Poisson : Premièrement, je ne vois pas très bien les raisons pour lesquelles on modifierait la loi de 1905, dans le seul but de faire « entrer l’islam ». Deuxièmement, la principale difficulté – en plus des principes fondateurs de l’islam lui-même, et de leurs conséquences politiques – provient du fait qu’il n’y a pas d’autorité constituée en Islam. Par conséquent, aucun musulman n’a le pouvoir de représenter tous les autres, et donc de signer avec la République Française quelque accord que ce soit. Ce constat écrase dans l’œuf la possibilité d’un « concordat » avec quelque chose qui ressemblerait à un « islam de France », le premier étant impossible parce que le second n’existe pas. L’islam ne peut pas s’extraire de l’Oumma, et il ne peut pas être représenté par une autorité unique.
Troisièmement, à défaut de pouvoir dialoguer avec une autorité islamique unique, du moins est-il possible de dialoguer avec les représentants locaux des associations qui portent des crèches, des écoles, les centres culturels, les mosquées, des bibliothèques, des librairies et toutes les organisations à caractère islamique. C’est dans ce domaine, et dans ce domaine seul, qu’une évolution de la Loi de 1905 est envisageable. Non pas pour en faire changer le principe mais pour adapter les dispositions qui concernent les associations cultuelles, ces associations spécifiquement chargées de porter ou supporter l’exercice d’une pratique religieuse. Un renforcement des modalités d’agrément et du pouvoir de contrôle de l’État sur ces associations doit être envisagé. Pour le reste, souvenons-nous toujours de ces difficultés : l’islam est fondamentalement incompatible dans sa doctrine avec les principes de la vie sociale occidentale, ces mêmes principes qui garantissent à tout musulman pacifique le droit de pratiquer sa religion comme il le veut. Il appartient à la société française d’ajuster la vivacité et l’énergie du contrôle sur les pratiquants musulmans à proportion du danger que représente un certain nombre d’entre eux.

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