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En juillet 1992, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, alors dirigée par le cardinal Ratzinger, publiait une réponse aux questions des évêques américains. La voici, dans le style propre des documents romains.
Une législation a récemment été proposée, en différents endroits, qui rendrait illégale toute discrimination sur la base de l’orientation sexuelle. Dans certaines villes, les autorités municipales ont mis à la disposition des couples homosexuels (et hétérosexuels non mariés) des logements publics, réservés autrement pour les familles. De telles initiatives, même si elles semblent plus viser le soutien des droits civils élémentaires que prôner l’admission de l’activité homosexuelle ou du style de vie homosexuel, peuvent en fait avoir un impact négatif sur la famille et sur la société. Des faits comme l’adoption des enfants, l’emploi d’enseignants, les besoins de logement des familles véritables, les préoccupations légitimes des propriétaires en triant les locataires éventuels, par exemple, sont souvent en jeu.
Tandis qu’il serait impossible de prévoir toutes les éventualités en ce qui concerne les propositions de loi dans ce domaine, les présentes observations vont essayer d’identifier des principes et des distinctions de nature générale qu’il conviendrait que prennent en considération le législateur consciencieux, l’électeur ou l’autorité ecclésiale qui se trouvent devant de telles questions.
La première partie rappelle des passages pertinents de la « Lettre aux évêques de l’Église catholique sur la pastorale à l’égard des personnes homosexuelles », publiée en 1986 par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. La seconde partie traitera de leur application.
1. La Lettre rappelle que la « Déclaration sur certaines questions d’éthique sexuelle », publiée en 1975 par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, « tenait compte de la distinction faite communément entre la condition ou tendance homosexuelle et les actes homosexuels ». Ces derniers sont « intrinsèquement désordonnés » et ne peuvent « en aucun cas être approuvés » (n. 3).
2. Puisque « dans la discussion qui suivit la publication de la Déclaration (mentionnée ci-dessus), la condition homosexuelle a donné lieu à des interprétations excessivement bienveillantes, certains allant jusqu’à la qualifier d’indifférente ou même de bonne », la Lettre poursuit en clarifiant : « Bien qu’elle ne soit pas en elle-même un péché, l’inclination particulière de la personne homosexuelle constitue néanmoins une tendance, plus ou moins forte, vers un comportement intrinsèquement mauvais au point de vue moral. C’est la raison pour laquelle l’inclination elle-même doit être considérée comme objectivement désordonnée. Aussi ceux qui se trouvent dans cette condition devraient-ils faire l’objet d’une sollicitude pastorale particulière, afin qu’ils ne soient pas enclins à croire que l’actualisation de cette tendance dans les relations homosexuelles est une option moralement acceptable » (n. 3).
3. « Comme dans tout désordre moral, l’activité homosexuelle entrave la réalisation et la satisfaction personnelle, parce qu’elle est contraire à la Sagesse créatrice de Dieu. En rejetant des opinions erronées concernant l’homosexualité, l’Église ne limite pas, mais défend plutôt la liberté et la dignité de la personne entendues d’une façon réaliste et authentique » (n. 7).
4. En ce qui concerne le mouvement homosexuel, la Lettre déclare : « Une des tactiques utilisées consiste à affirmer, d’un ton de protestation, que toute critique ou réserve à l’égard des personnes homosexuelles, de leur activité et de leur style de vie, est purement et simplement une forme de discrimination injuste » (n. 9).
5. « On assiste même, en certaines nations, à une véritable tentative de manipulation de l’Église pour obtenir le soutien, souvent bien intentionné, de ses pasteurs en faveur d’un changement des normes de la législation civile. Et cela, en vue de mettre celle-ci en accord avec les conceptions de ces groupes de pression selon lesquels l’homosexualité est une chose parfaitement inoffensive sinon tout à fait bonne. Bien que la pratique de l’homosexualité représente une menace sérieuse pour la vie et le bien-être d’un grand nombre de personnes, les protagonistes de ce courant ne renoncent pas à leur action et refusent de prendre en considération l’étendue du risque qui y est impliqué » (n. 9).
6. « Elle (l’Église) est consciente que l’opinion selon laquelle l’homosexualité serait équivalente à l’expression sexuelle de l’amour conjugal ou aussi acceptable qu’elle, a un impact direct sur la conception que la société a de la nature et des droits de la famille, et met ceux-ci sérieusement en danger » (n. 9).
7. « Il faut fermement déplorer que les personnes homosexuelles aient été et soient encore l’objet d’expressions malveillantes et de gestes violents. Pareilles actions, où qu’elles apparaissent, méritent la condamnation des pasteurs de l’Église. Elles manifestent un manque de respect pour les autres qui lèse les principes élémentaires sur lesquels se fonde une juste convivialité civile. La dignité propre de toute personne doit toujours être respectée dans les paroles, dans les actions et dans les législations.
Cependant, la saine réaction contre les injustices commises envers les personnes homosexuelles ne peut en aucune manière conduire à affirmer que la condition homosexuelle n’est pas désordonnée. Quand on accueille de telles affirmations et dès lors qu’on admet comme bonne l’activité homosexuelle ou quand on introduit une législation civile pour protéger un comportement pour lequel nul ne peut revendiquer un droit quelconque, ni l’Église ni la société dans son ensemble ne devraient s’étonner que d’autres opinions et pratiques déviantes gagnent également du terrain et que croissent les réactions irrationnelles et violentes » (n. 10).
8. « De toute façon, on doit éviter la supposition, injustifiée et dégradante, que le comportement homosexuel des personnes homosexuelles est toujours et absolument compulsif, et dès lors irresponsable. En réalité, il faut reconnaître à ceux qui ont une tendance homosexuelle la liberté fondamentale qui caractérise la personne humaine et lui confère sa dignité particulière » (n. 11).
9. « Dans l’appréciation d’éventuelles propositions de loi, on devra avant tout favoriser l’engagement en faveur de la défense et de la promotion de la vie de la famille » (n. 17).
10. « L’orientation sexuelle » ne constitue pas une qualité comparable à la race, l’origine ethnique, etc., en ce qui concerne la non-discrimination. À la différence de celles-ci, l’orientation homosexuelle est objectivement désordonnée (cf. « Lettre », n. 3) et fait naître une préoccupation morale particulière.
11. Il y a des domaines dans lesquels ce n’est pas une discrimination injuste de tenir compte de l’orientation sexuelle, par exemple dans le placement ou l’adoption d’enfants, dans l’engagement d’instituteurs ou d’entraîneurs sportifs, et le recrutement militaire.
12. Les personnes homosexuelles, en tant que personnes humaines, ont les mêmes droits que toutes les personnes, y compris le droit de ne pas être traitées d’une manière qui porte atteinte à leur dignité personnelle (cf. n. 10). Entre autres droits, toute personne a le droit au travail, au logement, etc. Néanmoins, ces droits ne sont pas absolus. Ils peuvent être légitimement limités en raison d’un comportement externe objectivement désordonné. Ceci est parfois non seulement licite mais obligatoire. D’ailleurs, ceci vaudrait non seulement dans le cas d’un comportement coupable mais même dans le cas d’actions de malades physiques ou mentaux. Il est ainsi accepté que l’État puisse restreindre l’exercice des droits, par exemple dans le cas de personnes contagieuses ou malades mentalement, afin de sauvegarder le bien commun.
13. Inclure « l’orientation homosexuelle » parmi les considérations sur la base desquelles il est illégal de discriminer peut facilement amener à considérer l’homosexualité comme une source positive des droits humains, par exemple en ce qui concerne les mesures anti-discriminatoires en faveur des minorités ou le traitement préférentiel dans les pratiques d’embauche. Ceci est d’autant plus nuisible qu’il n’y a aucun droit à l’homosexualité (cf. n. 10), qui ne devrait donc pas constituer le fondement de revendications juridiques.
L’homosexualité d’une personne serait invoquée contre la discrimination alléguée et ainsi l’exercice des droits serait défendu précisément par le biais de l’affirmation de la condition homosexuelle, au lieu que ce soit en fonction d’une violation des droits humains élémentaires.
14. L’orientation sexuelle d’une personne n’est pas comparable à la race, au sexe, à l’âge, etc., et pour une autre raison que celle qui est donnée ci-dessus et qui justifie l’attention. L’orientation sexuelle d’une personne n’est généralement pas connue des autres à moins que la personne ne s’identifie publiquement comme ayant cette orientation ou à moins que quelque comportement évident ne la manifeste. En règle générale, la majorité des personnes à tendance homosexuelle qui s’efforcent de mener une vie chaste ne rendent pas publique leur orientation sexuelle. Dès lors, le problème de la discrimination sur le plan de l’emploi, du logement, etc., ne se pose habituellement pas.
Les personnes homosexuelles qui affirment leur homosexualité ont tendance à être précisément celles qui considèrent le comportement ou le style de vie homosexuel comme « une chose parfaitement inoffensive sinon tout à fait bonne » (n. 9), et dès lors méritant l’approbation publique. C’est dans ce groupe que l’on risque de trouver ceux qui cherchent à « manipuler l’Église pour obtenir le soutien, souvent bien intentionné, de ses pasteurs en faveur d’un changement des normes de la législation civile » (cf. n. 9), ceux qui recourent à la tactique qui « consiste à affirmer, d’un ton de protestation, que toute critique ou réserve à l’égard des personnes homosexuelles... est purement et simplement une forme de discrimination injuste » (cf. n. 9).
De plus, il y a un danger qu’une législation qui ferait de l’homosexualité le fondement de droits puisse en réalité encourager une personne ayant une orientation homosexuelle à la déclarer publiquement ou même à chercher un partenaire afin de profiter des dispositions de la loi.
15. Puisque « dans l’appréciation d’éventuelles propositions de loi, on devra avant tout favoriser l’engagement en faveur de la défense et de la promotion de la vie de la famille » (cf. n. 17), il faudra faire strictement attention aux dispositions particulières des mesures proposées. En quoi influenceraient-elles les adoptions ou les placements d’enfants ? Protégeraient-elles les actes homosexuels, publics ou privés ? Confèrent-elles aux unions homosexuelles un statut familial équivalent, par exemple, eu égard au logement public ou en donnant droit au partenaire homosexuel à des prérogatives d’emploi pouvant inclure des choses comme la participation de la « famille » à l’assurance maladie donnée aux employés (cf. n. 9).
16. Finalement, là où il s’agit d’une question de bien commun, il ne convient pas que les autorités ecclésiales approuvent une législation contraire ou y restent indifférentes, même si celle-ci accorde des exceptions aux organisations et institutions ecclésiales. L’Église a la responsabilité de promouvoir la vie de la famille et la moralité publique de toute la société civile à partir de valeurs morales fondamentales, pas simplement de se protéger de l’application de lois nuisibles (cf. n. 17).
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