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Les Diaboliques

26 octobre 2011 Tancrède

« La patience à supporter les offenses qui s’adressent à nous, c’est de la vertu ; mais rester insensible à celles qui s’adressent à Dieu, c’est le comble de l’impiété. »
Saint-Jean Chrysostome.

En guise de diptyque aux Réparatrices.

L’actualité de la fronde catholique

Etape n°1 : le blasphème. Sur le portrait du Salvator Mundi d’Antonello da Messina (peintre italien catholique de la Renaissance, qui s’en retournerait dans sa tombe en apprenant l’usage que la postérité a fait de son art inspiré par sa foi vivace) des enfants lancent des projectiles, avant qu’un vieillard, personnage central de la pièce, ne vienne y déverser ses excréments. Nous laissons méditer le lecteur sur ces images mais aussi, et peut-être surtout, sur la perversion qu’il y a à mettre à la besogne des enfants, qui sont l’innocence même, et qui ignorent encore la gravité du geste qu’on leur demande d’accomplir.

Castellucci en Avignon

Etape n°2 : la réaction des ardents

Réjouissons-nous, car nos évêques commencent à prendre conscience de la tristesse et des manifestations d’agacement légitimes de leurs ouailles.

Etape n°3 : la répression

Ici

Et surtout .

Etape n°4 : inaction des protestants

Le site protestant « Actualité chrétienne » constate que « la provocation blasphématoire est à la mode » et se demande si elle ne serait pas « le gage d’un succès assuré pour artiste raté ? » Question rhétorique et faussement naïve – la réponse étant bien évidemment positive – qui a néanmoins le mérite de montrer comment les réactions indignées des chrétiens sont exploitées à des fins médiatiques par les blasphémateurs. Sachant qu’aujourd’hui les œuvres d’art ne sont plus estimées pour leur valeur esthétique, pour leur potentiel d’exception si l’on veut, mais qu’elles sont, au contraire, cotées financièrement selon des critères d’audience, de masse et d’impact médiatique, on comprend pourquoi le blasphème est à la mode.

Mais que proposent donc ces chrétiens si fiers d’être « évangéliques » ? Bien loin de s’attaquer aux blasphémateurs, ils s’attaquent aux catholiques. Ils désapprouvent ainsi les méthodes « catholiques » de Civitas, « mauvais relents qui proviennent tout droit du temps des croisades ». Nous laissons là les hérétiques d’« Actualité chrétienne » à leurs fantasmes de pureté, nous les savons fidèles à leur vieille tradition d’orgueil, comme le démontre un peu plus loin ce passage de leur article, dans lequel ils se targuent d’une connaissance aiguisée du nouveau Testament : « Jésus n’avait rien d’un terroriste, refusant même de se défendre à son propre procès… » Ah ! ces protestants, toujours à réduire l’unité des évangiles à la pluralité de leurs misérables interprétations personnelles, qui leur permettront tantôt de légitimer leurs petits états d’âme du jour et leur contraire le lendemain.

Enfin, prenons note de ce qui constitue l’insulte suprême à leurs yeux huguenots : « User des méthodes propres aux islamistes seraient (sic) un blasphème en lui-même. » Outre l’inintelligibilité absolue de cet argument (« blasphème en lui-même » est une expression dépourvue de sens), je ne vois pas en quoi les « méthodes » évoquées et volontairement non précisées seraient « propres » aux musulmans, surtout si elles sont pacifiques. L’ennemi d’ailleurs, sur ces questions, est moins la communauté musulmane [1] que la clique maçonnique et laïcarde de Delanoë et Sarközy. Mais la comparaison demeure délirante et transcende hélas les simples colonnes impies d’« Actualité huguenote » puisqu’on la retrouve dans l’a priori plus sérieux Le Monde qui titre ridiculement : « Le théâtre à son tour ciblé par les fatwas culturelles des fondamentalistes chrétiens ». Fatwas ? Extraordinaire. Fondamentalistes ? Le fondamentalisme n’a par définition rien de catholique. Enfin, et c’est le bouquet, nos amis protestants achèvent leur article avec cette question absurde : « Que ferait Jésus à notre place ? » Premièrement il occupe la sienne et n’a pas l’intention de déchoir dans la misère intellectuelle d’un hérétique illuminé et deuxièmement il répondrait ceci : « N’allez pas croire que je sois venu apporter la paix sur la terre ; je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive » (Matthieu, 10:34).

Etape n°5 : la trahison des tièdes

Pendant que les organisateurs de cette pièce dite « de théâtre » se réjouissent de la réussite crasse de leur plan marketing, pendant qu’ils salivent de profiter bientôt de ses grasses retombées financières, pendant que la Ville de Paris se frotte les mains en voyant ses subventions amorties par la publicité de la colère et de la douleur, pendant que Sodome envoie 100 justes en garde à vue, pendant tout ce temps, eh bien quelques vieux chrétiens insensibles au blasphème perdent leur temps à ratiociner derrière leur clavier sur les méthodes « inacceptables », « extrémistes » et « violentes » mises en œuvres, pourtant, par quelques jeunes catholiques courageux et terriblement blessés qui étaient venus manifester, pacifiquement, leur tristesse. Certes, les ardents sont nostalgiques d’une époque où l’Eglise manifestait la puissance et imposait le respect, avant que la République ne La dévore et ne La soumette à exécuter tous ses desiderata. Depuis lors, il n’y a jamais eu autant d’irrespect envers Elle et autant de blasphèmes contre le Christ. La subversion n’est donc plus aujourd’hui du côté des vieux quinqua, des bobos, des soixante-huitards friqués : ceux-là applaudissent l’entrée des forces de l’ordre ; vous assistez sur la vidéo à ce renversement. La subversion, aujourd’hui, c’est la jeunesse catholique. Pas les vieux singes de mai 68.

Mais surtout, comment expliquer la trahison de ces blogueurs catholiques ? Comment expliquer qu’ils reproduisent sans la contester la rhétorique médiatique largement anticléricale de Rue89 ou du Monde ? Comment expliquer qu’ils s’en prennent au peuple chrétien qui souffre à travers son Dieu et non à ceux qui nous font souffrir à travers Lui ? Et eux, que font-ils ? Au lieu de dénoncer le scandale, et de le dénoncer à leur niveau, réputé plus intellectualiste, au lieu d’agir contre le blasphème selon leur puissance, selon leurs compétences propres, théologiques, esthétiques, éthiques, au lieu, donc, de faire front commun avec tous les talents, ils recréent du scandale en s’en prenant à leurs frères et en leur donnant des leçons de morale avec une arrogance surprenante ! Ainsi, Machin, du blog Pensées d’outre politique, s’attaque avec une rare violence aux jeunes membres de l’Institut Civitas et à leur secrétaire général Alain Escada… Et quoique sans légitimité et sans autorité, il s’érige en censeur ; en attendant, il n’agit pas, il papote, ne sert à rien, certains du soutien des évêques. Or, même sur ce point, qu’il périsse : les évêques ne sont pas tous des « chiens muets » comme il peut l’être, ils militent, et fermement, à l’instar de Mgr Aillet, évêque de Bayonne [2]. La christianosphère des modérés n’a pas plus d’intérêt que La Croix [3], et leur parole pas plus d’écho que celle d’André XIII.

Ce que la modération bête [4] du blog Pensées d’outre politique ne comprend pas et ne voit pas alors que tout est sous ses yeux, c’est que la logique marketing des « artistes » contemporains fait très-précisément le pari de notre mollesse et de notre docilité. Et pourtant, les modérés savent qu’on n’aurait jamais osé faire la même chose avec un rabbin ou avec Mahomet, qu’il n’y aurait eu ni subventions, ni public, mais une levée de boucliers générale. Mais pourquoi ? Ils ne se le demandent pas. C’est la question que je leur pose. Pourquoi ? Parce que les blasphémateurs sont des pleutres dépourvus de toute noblesse et de tout courage et qu’ils se dégonfleraient si on leur proposait d’organiser un kiss-in devant une mosquée ou devant Saint-Nicolas du Chardonnet. Du coup, par crainte d’y laisser des plumes mais par un désir simultané de passer pour un Révolutionnaire Millénaire quand on n’est guère qu’un rat misérable, ils s’attaquent à un cadavre de chrétienté glorieuse et à ses symptômes masochistes et souriants : Monseigneur Gaillot, Alain de La Morandais, André XXIII.

Une conclusion

Contre les perfidies insignes du diable, contre toutes ses diaboliques menées de concert contre nous, contre l’unité du Vice, il ne faut pas opposer nos voix discordantes.

Il n’y a donc, selon nous, non pas une méthode unique, mais deux méthodes enchâssées de lutte contre ces immondices. Il faut montrer premièrement qu’elles ne relèvent pas de l’art, et dire deuxièmement, une fois que leur vrai visage sera révélé au grand jour, qu’elles ne méritent pas d’exister.

Les deux combats du catholicisme éternel contre les erreurs de l’art actuel consistent donc à combattre le non-art actuel intellectuellement puis à combattre ce non-art actuel politiquement. Les Réparatrices en suggèrent les contours militants.


[1Voir ici, , ou

[2Cité ici dans un courrier adressé à Civitas en date du 11 octobre 2011 : « La christianophobie ambiante, diligentée de près ou de loin par de secrètes officines, ne semble pas atteindre outre mesure le moral de nos responsables politiques. Allons-nous revenir à une période de persécution qui dirait son nom ? Il est peut-être trop tôt pour la dire ; en tout cas, il est du devoir de chaque catholique de défendre le Christ et la sainte Eglise. Je vous encourage donc à servir cette noble cause en repartant sans cesse de la Croix du Seigneur. »

[3Ainsi l’inutile Dominique Greiner, pour ce bel article de résistance anti-chrétienne dans « La Croix »

[4J’appelle modération bête la modération qui se prévaut à elle seule de détenir la solution universelle à tous les problèmes posés par le monde plutôt que de retenir sa solution comme une solution particulière parmi l’arsenal à disposition des chrétiens.

26 octobre 2011 Tancrède

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