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[EUTHANASIE] Un soulagement pour la famille ?

En ce début d’année, le Rouge et le Noir se propose de réfuter un par un chacun des arguments phares des partisans de l’euthanasie.
Retrouvez l’ensemble de notre dossier.

L’euthanasie : une possibilité de soulager la tristesse des familles qui voient souffrir un de leur proche ? Allez dire ça aux Belges !

Dans le petit pays qui a permis l’euthanasie depuis 2004, plusieurs affaires judiciaires ont prouvé combien les familles pouvaient subir l’euthanasie de manière très douloureuse.
Telle est l’histoire de Tom Mortier, un citoyen du nord du pays dont la mère avait été euthanasiée en 2012. Selon M. Mortier, la loi n’aurait pas été correctement appliquée car sa mère souffrait d’une dépression chronique, ce qui ne constitue pas un critère suffisant au regard de la loi belge sur l’euthanasie. Il aurait également fallu une souffrance non-curable. Mme Mortier a donc été euthanasiée, mais ses enfants n’en ont même pas été informés ! Summum de la bureaucratie, c’est par une lettre recommandée de l’hôpital qu’ils ont appris le décès de leur propre mère. Son fils Tom a donc décidé de porter plainte contre le médecin euthanasieur, le Dr. Wim Distelmans… qui n’est autre que le président de la « Commission de contrôle » de l’euthanasie.
D’autres affaires touchent ce Dr. Distelmans, ainsi que d’autres médecins ailleurs dans le pays. A chaque fois les plaintes ont été déposées par les familles, qui estimaient que leur proche avait été euthanasié sans leur consentement. Mais il est fort possible que d’autres cas passent sous les radars car les personnes euthanasiées n’avaient pas de proches suffisamment informés pour agir en justice.

L’euthanasie est-elle demandée par les familles ?
Dans les très rares pays qui ont légalisé l’euthanasie, le monde politique s’est appuyé sur des revendications supposées du corps médical ou des familles. Moyen aisé d’amener un sujet délicat à l’agenda politique tout en se dédouanant de sa responsabilité morale : on prétend n’être que le porte-voix d’une partie de la population, assumant par-là un rôle de prétendu défenseur du bien commun. C’est encore plus facile lorsque ledit groupe se prétend victime d’une injustice, le politicien anomique se drape alors dans la toge immaculée du chevalier du Bien.
Dans le cas qui nous préoccupe, les médecins étaient préoccupés par le vide juridique entourant la fin de vie, tandis que les familles devaient vivre l’injustice de voir leur proche souffrir sans rien faire (c’est en tout cas ce que prétendaient les promoteurs de la loi, ce qui est tout sauf vrai).
Au-delà de l’hypocrisie dans le chef du monde politique, qui n’a même plus assez d’honneur pour avancer à visage découvert, reconnaissons que l’argument tient formellement la route. La souffrance d’un proche n’est jamais facile a vivre car l’on se sent impuissant à soulager les souffrances de celui que l’on aime. Beaucoup d’entre nous ont probablement assisté (ou vivent actuellement) à la décrépitude physique et mentale de leurs grands-parents, ou à tout le moins de leurs aînés du troisième âge.
Même si la société actuelle a du mal à l’accepter, cette réalité de la souffrance et de la mort touche tous les milieux et toutes les confessions. Mais dans le milieu naturel de l’homo festivus errant entre les divertissements pascaliens, l’angoisse due à la souffrance est un tabou.

La solitude, pire que la souffrance :
On veut évacuer la question de la mort, mais celle-ci reviendra toujours dans la vie de chaque famille. La souffrance est son corollaire funeste, qui accompagne bien des malades contre leur gré. Il faut beaucoup de force psychologique et d’accompagnement attentif pour faire abstraction de la douleur. Certains s’aident de la force puisée au plus intime de leur foi, d’autres « tiennent le coup » par le soutien de ceux qu’ils aiment. Et c’est dans ces moments de déliquescence physique que l’on se rend compte de toute la force et de toute la considération qui peut émaner d’une famille aimante.
A contrario, c’est lorsque les visites se font rares, que le malade ressent qu’il est devenu un « boulet » pour sa famille ou que le soutien affectif se fait bien trop léger, que les patients sont le plus à même de vouloir en finir.
Les exemples belges et hollandais le montrent bien : les patients qui demandent l’euthanasie à leur médecin sont ceux qui n’ont plus le soutien de leurs proches. Que des petits-enfants ou des anciens amis se fassent présents et le patient demande plutôt à aller en soins palliatifs. De plus, le suivi de l’état du malade par la famille décourage également les médecins de pratiquer une euthanasie cachée (comme débrancher l’assistance respiratoire ou le baxter d’alimentation sans demande du patient). La présence des familles permet donc d’éviter les dérives de l’euthanasie.

La famille : un lieu de compassion pour les malades
Mais ce n’est pas uniquement parce que notre proche a mal que l’on veut évacuer la question de la souffrance. A moins d’être terriblement sadique, il est bien plus difficile de rester avec quelqu’un qui souffre que de s’en détourner pour ne plus penser qu’à son train-train quotidien. Voir souffrir celui qu’on aime est une souffrance en soi. Et d’autant plus dure que l’on ne peut bien souvent que très peu – à moins d’être médecin bardé de diplômes - pour lui rendre la vie plus agréable. C’est ce que l’on appelle la compassion : « souffrir avec ». A la souffrance s’ajoute donc l’injustice de la situation.
Ces sentiments sont naturels, mais ce qui compte, c’est l’intention que l’on a par rapport au malade. Veut-on apaiser ses douleurs pour lui rendre la vie moins pénible ou pour ne plus en être touché personnellement ? Ce serait alors une inversion du bien-fondé de l’intention : les familles qui voudraient voir leur proche mourir seraient considérés comme des « humanistes », tandis que celles qui voudraient garder leur proche en vie seraient « sans cœur ». Au final, c’est alors l’inversion de l’idée même de famille, qui est le tout premier lieu de solidarité et de compassion.

L’actuel débat au sujet de l’euthanasie révèle in fine la fin de la solidarité à l’intérieur des familles. De source de vie, les familles de notre pays sont en passe de devenir une cour martiale où se décide qui a le droit de rester en vie. Va-t-on devoir mettre un panneau « danger de mort » à l’entrée des maisons dont les membres ne veulent plus soutenir l’un des leurs en mauvaise santé ?
C’est donc à nous de lutter contre l’euthanasie de nos proches, en faisant que jamais ils ne se sentent délaissés sur cette Terre.

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