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Le Kosovo est une région du Sud de la Serbie. De tout temps habitée par les Serbes, elle a connu un peuplement albanais plus récent. A la suite des guerres des Balkans entre 1991 et 1995, le Kosovo a proclamé son indépendance de la Serbie en 2008, dans le cadre de tensions ethniques et religieuses (Orthodoxes Serbes contre Musulmans d’Albanie). En prolongement de la vague de désinformation qui, dès 1991, avait présenté la Serbie comme le boucher unique responsable des violences dans la partition de l’ex-Yougoslavie, les hautes instances continuent d’appuyer leur soutien au Kosovo dépeint comme une minorité opprimée qui souhaite "disposer d’elle-même". En réalité, la population albanaise commet depuis longtemps des profanations et des violences innommables à l’encontre du peuple serbe. L’Union Européenne, grande amatrice d’ingérences outrancières sur fond de mensonge historique, adresse par la voix de sa commissaire aux Affaires Etrangères, Catherine Ashton, un ultimatum au président serbe : renoncer à sa souveraineté sur le Kosovo, ou perdre tout espoir d’intégrer un jour l’UE.
C’est dans ce contexte d’une rare violence que le Patriarche de Serbie, Irénée, s’adresse aux dirigeants de son pays.
Monsieur le Président,
Monsieur le Premier Ministre,
Monsieur le Vice-Premier Ministre,
En ce moment difficile et décisif, et peut-être fatal pour la Serbie et le peuple serbe, nous nous adressons à vous au nom de l’Église orthodoxe serbe, de façon paternelle et fraternelle, avec respect et confiance en votre conscience chrétienne orthodoxe et votre sentiment de patriotisme et de responsabilité gouvernementale. Nous ne nous adressons pas à vous de la manière habituelle, mais par un appel public, et ce pour plusieurs raisons, dont les deux plus importantes sont le temps trop court (l’ultimatum de Bruxelles expire déjà mardi) et la nécessité de clairement rejeter le mensonge que répandent sans vergogne certaines personnes et médias durant ces derniers jours, à savoir que notre Église se tairait sur le Kosovo.
Nous-mêmes, comme le peuple serbe entier, savons et ressentons à quel point vous êtes maintenant dans une situation difficile, devant quels choix douloureux vous vous trouvez, et à quelles pressions et chantages vous faites face. Nous vous rappelons, néanmoins, dans le but de vous encourager, que votre situation n’est pas plus difficile que celle du juste Prince [Lazare] la veille de la bataille de Kosovo [1389], de la princesse Milica après celle-ci, des patriarches Païssy, Arsène III Čarnojević et d’autres sous le joug ottoman, du diacre martyr Avakum avant le soulèvement contre les Turcs, de Karageorges et Miloš pendant les deux autres soulèvements, du roi et du gouvernement serbes lors l’ultimatum austro-hongrois de 1914, ou encore que celle de l’État serbe dans le passé récent, au moment de l’ultimatum de Rambouillet.
De par sa nature conciliaire, l’Église n’est pas opposée à l’unification européenne des peuples et des États, ni à l’idée de processus d’union encore plus larges. Au demeurant, c’est l’Église qui, historiquement, a conçu et détient le concept d’unité de toute l’humanité et de toute la création Divine dans le Christ. Mais ici, il ne s’agit pas de cela. On exige maintenant de la Serbie, par un ultimatum, de renoncer de facto au Kosovo et à la Métochie, à la source de notre existence ecclésiale, nationale et étatique, et à l’abandon du reste du peuple serbe qui y subsiste, le laissant à la merci de ceux qui ont précédemment tué ou expulsé sa plus grande partie, et ce en échange d’une possibilité vague et incertaine de recevoir, conditionnellement – uniquement pour la Serbie -, d’une « date pour le commencement des négociations » [pour l’entrée de la Serbie dans l’U.E., ndt]. Des négociations dont la durée et l’issue ne peuvent être prévues par nul vivant.
Grâce à la sincérité brutale, mais combien salutaire du discours tenu à Berlin, à la différence de celui de Bruxelles, une seule chose est prévisible et connue, à savoir que l’ultimatum disposera finalement : ou bien vous reconnaissez officiellement, formellement, « l’État du Kosovo », ou alors il n’y aura aucune adhésion à l’Union Européenne. En d’autres termes : on exige des Serbes qu’ils renoncent volontairement au territoire et à la souveraineté, voire même aux traces de leur vie millénaire au Kosovo et en Métochie (sachant que les Albanais du Kosovo et de la Métochie, en présence des forces de l’OTAN peuvent impunément profaner des églises, des monastères et des cimetières, ainsi qu’attaquer des gens), et on offre en retour une promesse vide, non contraignante « d’avenir radieux européen », c’est-à-dire qu’en pratique, il s’agit d’un grand rien, avec le message cynique : ne laissez pas échapper cette occasion !
L’esprit de l’Union Européenne actuelle n’est pas, malheureusement, celui de la bonne vieille Europe. Nous soutenons, comme par le passé, l’idée d’une union spirituelle et économique libres du continent européen, mais en aucun cas un projet d’asservissement ou d’humiliation de quel État européen que ce soit, dont notre Serbie. Nous sommes convaincus qu’aucun gouvernement serbe, dont l’actuel, n’a ni le droit, ni le mandat, pour accepter les conditions qui ne sont imposées à aucun autre État candidat pour devenir membre de l’Union Européenne. Le « ticket d’entrée » est trop cher. La Serbie ne saurait accepter de payer d’avance un tel prix pour une marchandise qui, en définitive, ne lui sera peut-être jamais livrée. Elle ne l’a jamais fait dans son histoire, malgré la potion amère qu’elle a dû boire pour cette raison à travers les siècles.
La promesse pré- et post- électorale que vous avez faites, vous qui avez reçu la confiance populaire pour diriger le vaisseau gouvernemental de la Serbie en ce temps tumultueux et troublé, était que, en aucun cas, vous ne trahiriez, livreriez ou vendriez le Kosovo et la Métochie, l’ancienne Serbie historique.
Nous, évêques de l’Église orthodoxe serbe, sommes convaincus de représenter et d’exprimer la position de tous ses fidèles et considérons de notre devoir sacré de vous rappeler cette promesse. Aussi, nous vous assurons que nous attendons, tout comme l’immense majorité de notre peuple, que vous la teniez. Nous le faisons précisément maintenant, car nous sommes pleinement conscients de la tragédie du moment et du fardeau de la responsabilité qui repose sur vos épaules.
Néanmoins, l’espérance ne meurt jamais. Lorsque se dissiperont les nuages, le soleil brillera. Demain, notre Église célébrera le dimanche de la vénération de la Croix, et bientôt, ce sera la fête de la Résurrection. Lorsque nous avons deux maux devant nous, le moindre mal est la meilleure solution. Nous croyons en l’amour et l’aide de Dieu, tant envers nous qu’envers tous les hommes de bonne volonté.
Avec notre bénédiction,
Le président du Saint-Synode des Evêques, le Patriarche de Serbie Irénée.
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