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Sylvain Tesson semble revêtir tous les habits de l’homme habile. Sur les plateaux télévisés, il passe pour le rebelle à la société de consommation, le fêtard alpiniste, le mondain spirituel ou encore la gueule cassée à la suite de son accident d’escalade alcoolisée ayant failli avoir eu raison de sa vie. En somme, Tesson peut plaire à tout le monde : au décroissant, au communiste, au droitard nostalgique du passé et à la gente fémine en raison de son côté aventurier. En plus de toutes ces facettes apparemment contradictoires, le fils du journaliste et polémiste Philippe Tesson adopte face aux journalistes un ton calme tout en prenant des positions prudentes et mesurées. En clair, le Tesson cathodique ne se mouille pas trop lorsqu’il doit se farcir la caste « merdiatique ».
Fort heureusement, ce manque de verve télévisuelle ne se retrouve pas dans ses livres, et en particulier dans Berezina qui raconte la retraite de la campagne napoléonienne de Russie. L’habile Sylvain Tesson ne se contente pas de produire un ouvrage historique, il superpose dans son roman deux narrations. La première raconte le retour des grognards au pays pourchassés par le général russe Koutouzov et la seconde décrit les péripéties de l’auteur entouré de camarades français et russes sur le même chemin emprunté par les soldats de Napoléon pour revenir en France. Bien entendu, l’aventurier Tesson n’a pas pris la route en été mais a décidé revivre, bien sûr très superficiellement, les horribles conditions hivernales de la retraite gallicane.
Hommage vibrant à la gloire des soldats de l’Empire qui ont su tout sacrifier pour une idée plus étendue que leur petite individualité, le récit décrit tous les tourments vécus par les grognards : massacres, sacrifices pour le groupe, maladies et même cannibalisme. Naturellement, la troupe de Tesson a certes très froid mais les mortifications consistent plutôt dans des pannes de side-cars, des problèmes d’itinéraires ou dans des gueules de bois difficiles. L’auteur insiste bien sur la petitesse de son entreprise en comparaison de l’épopée napoléonienne. Les descriptions de ses aventures donnent une légèreté bienvenue au roman venant contrebalancer l’ambiance lourde et tragique des nombreuses pages consacrées au retour des soldats français. Il arrive même à transformer la retraite française en victoire. En effet, si l’aigle impérial a perdu la guerre contre l’ours russe, d’un point de vue militaire, la France a quasiment gagné toutes les batailles au cours de la retraite. Les russes, sans même évoquer leurs nombreuses erreurs militaires, craignant trop la génie tactique de Napoléon, n’ont jamais attaqué les français de front pour préférer les suivre à la trace, les traquer comme des chiens.
Dans cet ouvrage profond et drôle, écrit dans un style vif, Sylvain Tesson rappelle à quel point notre époque est médiocre de luxe, de matérialisme, de conformisme et de cosmopolitisme. Il y célèbre les antiques valeurs d’honneur, de sacrifice, de courage et de force. La France napoléonienne, déjà bien imbibée de modernité, était encore une nation communiant autour d’un même idéal et capable de se battre pour le défendre. Aujourd’hui, on se bat pour acheter la dernière voiture ou le téléphone portable à la mode. Espérons qu’il reste encore des hommes au milieu des ruines.
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