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Résumé du livre : Le père d’Isabelle est membre d’un cabinet d’expertise comptable et de commissariat aux comptes, lorsqu’il prend connaissance de pratiques frauduleuses et de malversations politiques. Pour servir la vérité, Jean-Dominique refuse de les cautionner. Il ne se doute pas encore que suivre sa conscience sonne le glas de sa carrière. Manoeuvres d’intimidation et empêchements professionnels se succèdent, et c’est toute sa famille qui en subit les conséquences. Pourtant, au coeur de l’épreuve, la Providence veille. Le témoignage que nous livre sa fille est le récit d’un chemin de croix transfiguré par la foi, l’espérance et la charité.
R&N : Vous avez écrit un livre qui relate votre vie de famille et les menaces qui pesaient sur elle parce que votre père a dit la vérité. Ce que vous avez vécu est digne d’un scénario pour le cinéma. Nous pensons que les scénaristes imaginent et exagèrent souvent les histoires de mafia et de magouilles, mais cela est réel comme en témoigne votre livre. Pouvez-vous raconter à nos lecteurs comment les menaces évoluèrent ?
ISABELLE CALLIES : A vrai dire, ce qui est assez terrible, c’est que ça a été un peu plus radical que des menaces, avec une première tentative, ratée, de le faire taire en l’éliminant. Je raconte dans le témoignage les cinq tonneaux en voiture dont mon père est sorti pour ainsi dire indemne. Puis en effet il y a eu des menaces, qui ont visé cette fois-ci le père de famille dans la mesure où il s’agissait de faire prendre conscience à mon père que ce qu’il faisait ou disait pouvait avoir des conséquences néfastes pour toute la famille. Mais au-delà des menaces, il y a eu cet acharnement à décrédibiliser mon père aux yeux de la profession et de tous ceux à qui il pouvait s’adresser. Les méthodes pour y parvenir peuvent paraître surprenantes, ce serait sans doute un peu long de les détailler au cours de cet échange, mais je suis convaincue aujourd’hui qu’il n’est pas de meilleure façon de faire taire quelqu’un que de le faire passer pour un fou ou un paranoïaque. Ceci est d’autant plus vrai aujourd’hui que le simple fait de chercher à saisir la complexité d’un événement peut vous faire passer pour un adepte de la théorie du complot !
R&N : Votre père a démissionné pour avoir refusé de signer des documents qui cautionnaient des malversations politiques. Cela soulève donc l’interrogation de l’éthique dans le travail : est-ce que l’éthique existe dans les structures professionnelles à grande échelle ?
ISABELLE CALLIES : Je trouve difficile de parler d’éthique dans la mesure où ce terme a perdu de sa teneur à force d’être employé à toutes les sauces, y compris par des personnes qui soutiennent une éthique relativiste, propre à chaque culture et à chaque époque. Alors oui, l’éthique est présente dans les discours des structures professionnelles à grande échelle parce que cela donne une bonne image. Encore faudrait-il que ces paroles soient performatives, et que cette éthique dont tous les milieux professionnels se targuent repose sur quelque chose de solide qui ne change pas au gré des modes ! Quand mon père a refusé de cautionner des malversations politiques, je ne crois pas qu’il l’ait fait au nom d’une éthique, mais bien davantage en écoutant sa conscience, en cherchant une cohérence entre son désir de servir la vérité et le bien, et ses actes. L’honnêteté et l’intégrité sont des vertus qu’il faut faire grandir chez nos jeunes par l’exemple que peuvent donner les parents, les professeurs et l’ensemble des adultes que côtoient les enfants. Il me semble que c’est surtout à cette échelle que cela se joue.
R&N : Votre foi est très présente dans votre livre, vous racontez tous les clins Dieu reçus dans les épreuves et montrez que la Providence œuvrait à chaque instant. Le fait que votre famille soit catholique aurait pu être un élément supplémentaire pour que votre père soit menacé, voire exécuté ?
ISABELLE CALLIES : Je crois que la foi de Papa l’a conduit à poser la décision de ne pas cautionner des malversations. Le don de la foi permet de prendre part au mystère de la Croix qui conduit à la Résurrection. Nous sommes tous appelés à vivre du Christ, qui est la Vérité. Servir le Christ, c’est servir la vérité et donc refuser le mensonge. En cela, mon père n’a jamais caché les racines de sa décision : écouter sa conscience, c’est écouter la loi que notre Créateur a inscrit au plus profond de nous. Je ne crois pas néanmoins que Papa ait été attaqué pour sa foi, ni même que sa foi ait pu être une cause supplémentaire pour chercher à le menacer. Certaines personnes ont eu peur que leurs mensonges puissent être mis au jour, cela a suffi à engager d’obscures manœuvres. Mais ce qui est certain, c’est que la foi de mon père l’a aidé à tenir bon, je peux même témoigner que cette épreuve demeure le lieu d’affermissement de la foi de mon père, ainsi que de celle d’autres membres de la famille. J’ai vu qu’en acceptant de tout perdre, alors on laisse à Dieu la possibilité de déployer sa toute-puissance paternelle ! Et là, croyez-moi, on gagne le gros lot ! Mais c’est un choix à reposer tous les jours, celui de lui abandonner avec confiance notre vie pour qu’Il en fasse un hymne à sa gloire !
R&N : Vous vous êtes confrontez au travail de l’écriture. Pourquoi vous et non votre père ?
ISABELLE CALLIES : Depuis longtemps j’ai griffonné sur des bouts de papier ce que je pouvais vivre au sein de ma famille, c’était une manière de me libérer d’un poids sans doute très lourd à porter pour une petite fille. Quand j’ai écrit ce témoignage, il y a cinq ans maintenant, je ne l’ai pas fait sur commande ni dans le but de le faire publier, je crois encore une fois que c’était un moyen de me décharger, de relire ces événements, et de rendre justice à ma famille. Pour écrire, il faut du temps, et la bataille que Papa a dû mener depuis vingt ans sur le plan professionnel ne lui a pas forcément laissé le temps dont il aurait eu besoin pour s’atteler à l’exercice d’écriture. Enfin, écrire est une chose, se laisser lire en est une autre et cela m’a pris du temps d’accepter de m’exposer ainsi au regard d’autrui.
R&N : Ce livre est aussi un très bel hommage que vous rendez à votre père d’une part, mais aussi à votre mère, qui a tenu son rôle d’épouse et de mère dans les plus grandes difficultés. Ils sont des exemples pour vous, dans votre construction à la fois professionnelle et personnelle ?
ISABELLE CALLIES : Certainement, ils sont pour moi des exemples de droiture, de fidélité conjugale et de cohérence. Sans les idéaliser pour autant, je crois pouvoir dire qu’ils ont mis la barre assez haut et que mes frères, ma sœur et moi-même sommes profondément marqués par leurs choix de vie. C’est avec le soutien de Maman que Papa a pris cette décision initiale de ne pas cautionner les malversations politiques. Tous deux portent le poids de cette décision, tous deux en ont assumé avec courage les conséquences. La cohérence de vie que j’ai pu voir chez mes parents me donne envie de suivre cet exemple, parce que cela donne une liberté immense que ne connaissent pas ceux qui cherchent à déformer la vérité pour qu’elle colle à leur petit scénario. Sur le plan professionnel – j’enseigne l’histoire et la géographie –, je vois cela comme un appel de chaque instant à avancer avec prudence dans la compréhension d’événements historiques, de décisions prises au cours de l’histoire, qui nous dépassent forcément. Nous voudrions tout faire rentrer dans des cases, moi la première, c’est tellement plus facile ! Mais cela demande de grandir en humilité pour rechercher sans cesse ce qui est vrai. Je ne peux pas m’empêcher de penser que je retrouverai un jour nombre de ceux dont j’évoque la vie en cours... Quant à ma construction personnelle, c’est sûr que l’exemple de mes parents tient une place importante, et peut-être plus particulièrement l’exemple de Maman qui me fait saisir un peu la force que la femme peut offrir à l’homme. Vous savez, quand saint Paul parle de « soumission », beaucoup grince des dents. Mais au sens littéral, « se mettre sous », c’est soutenir les décisions prises par l’époux qui, s’il agit comme le Christ à l’égard de son Eglise, ne peut que chercher le bien de l’aimée. La femme a un rôle essentiel à jouer dans le soutien qu’elle peut apporter à l’homme. Si elle part, tout se casse la figure. Alors c’est vrai que voir Maman soutenir son mari trainé dans la boue, pris pour fou, est un bel exemple pour moi.
Le livre Mon père a dit la vérité, d’Isabelle Callies, est publié aux Editions Salvator. 134 pages.
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