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Chaque mercredi, le Rouge & le Noir publie un extrait de Jean Ousset (1914-1994). Ces extraits ont pour objectif de répondre à une question, en se fondant sur les Ecritures.
L’argent coule à flot pour la « Culture de Mort ». Quand on voit les moyens financiers des agents de l’Esprit du Monde, comment croire que la promesse du Royaume puisse être faite aux pauvres ? Où est la force de la pauvreté réelle et de la pauvreté en esprit ? « Ne pas laisser réduire le catholicisme aux dimensions de notre vie privée, cela suppose (…) une véritable ascèse : ascèse de l’intelligence pour savoir comment Jésus-Christ veut régner sur la société, ascèse de la volonté grâce à laquelle l’être tout entier se donne à la sanctification du monde. »
Voici une méditation des Béatitudes tirée de l’ouvrage Pour qu’Il règne de Jean Ousset pages 528 à 541 :
Matthieu 5, 3 : « Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux. »
1. - Pauvreté réelle
L’erreur trouve devant soi les plus grandes facilités matérielles pour sa diffusion. Plus la « Révolution » a gangrené la société et plus elle s’est annexée les richesses et les moyens puissants de propagande. Mais la Vérité butte à chaque pas contre les difficultés pratiques et ne triomphera qu’au prix de nos sacrifices.
Loin de voir dans la pauvreté l’obstacle qui surgira inopinément, on devra la considérer comme faisant partie des conditions du travail pour « un ordre social chrétien ». Toute méthode d’action qui se voudra efficace devra en tenir compte. (…) Il se trouvera même des procédés importants de propagande - et donc excellents en soi - auxquels on devra renoncer, au moins temporairement, parce que trop onéreux.
Ce n’est pas en vain que Jésus-Christ a prêché la pauvreté et il a voulu attacher d’abondantes grâces à sa pratique. Moins l’homme peut compter sur ses propres forces et plus il doit, sans cesse, faire abandon à la divine Providence. Partant, son œuvre en est plus sainte, plus directement ordonnée à la gloire du Christ.
A tel point que la pauvreté matérielle est devenue comme un critère pour juger des organisations … Partent-elles avec de gros moyens, une intense propagande, un appareil coûteux ? Dans un cas, l’imprudence de leurs chefs et la méconnaissance des lois d’action contre-révolutionnaire engloutissent rapidement l’apport initial des donateurs. Dans l’autre cas, c’est l’esprit qui est mauvais et la dite « œuvre » ne tarde pas à montrer son vrai visage. Insensiblement, ou à l’occasion d’un événement, elle passe avec armes et bagages à la Révolution.
Pauvreté des organismes qui ne peut manquer d’atteindre leurs membres. Une œuvre qui vit d’aumônes, de souscriptions, etc... ne peut payer de hauts salaires à ceux qui lui consacrent leur vie, brisant parfois un avenir humain plein de promesses. Et quant aux bienfaiteurs, leur situation est quelquefois très humble.
Mais s’ils ont compris l’urgence de la contre-Révolution, ils n’hésitent pas devant les sacrifices. Fussent-ils riches, ils auraient des devoirs plus grands encore dans cet ordre, dont l’ambiance mondaine ne facilite guère l’accomplissement. Devoir de se dépouiller de tout ce qui n’est pas « le nécessaire », compte tenu du rang social à tenir, mais aussi devoir de choix dans la libéralité. La contre-Révolution exige une générosité intelligente, soucieuse d’efficacité.
Parce qu’elle ne disposera jamais d’autant de richesses que l’adversaire, la contre-Révolution a besoin qu’on la soutienne avec courage, mais aussi avec discernement.
(…) Quand donc aurons-nous ce « réflexe du portefeuille » dont parlait Léon Bloy ? Il n’est pas le moindre signe de vitalité d’une action contre-révolutionnaire. L’amour de la Vérité entraîne le désir de la servir en se dépouillant de son argent, de sont temps ou de l’usage des biens dont on croyait pouvoir jouir paisiblement.
2. - Pauvreté spirituelle
Mais qui oserait borner le sens de cette béatitude en refusant d’admettre qu’une certaine simplicité, une certaine humilité, une certaine mortification de l’esprit, y sont également conseillées ? Qui dira, tout au contraire, les ravages exercés au préjudice de la lutte contre le « droit nouveau » par l’orgueil intellectuel, le désir de briller et une certaine complaisance dans le savoir ?
Effroyable stérilité de ces intelligences qui ne cherchent qu’à briller et que le savoir pour le savoir préoccupe davantage que la tranquille et sûre possession de la vérité.
Bienheureux serons-nous donc si, tout au contraire, le nombre augmente parmi nous de ces esprits simples et droits uniquement préoccupés de l’ « essentiel », sans admiration pour la subtilité des sophistes (…)
Bienheureux, donc, les pauvres en esprit : bienheureux ceux qui estiment que la vérité ne leur appartient pas, qu’elle n’est pas la sécrétion normale de leur cerveau, qu’elle doit être au contraire recherchée, mendiée comme le bien le plus précieux.
Vertu de l’humilité d’esprit, principe de l’action féconde. (…)
Car « Dieu, écrit toujours Monseigneur Suenens , n’a pas lié le devoir de l’apostolat à quelque parchemin universitaire. Son choix de douze pêcheurs de Galilée n’indique nullement qu’un haut standing intellectuel soit indispensable pour fonder le royaume de Dieu. Il y a même un endroit dans l’Evangile où l’on voit Jésus pousser un cri de joie parce qu’il a plu à Son Père de réserver aux petits et aux humbles les secrets cachés aux sages et aux prudents de la terre. D’ailleurs, l’histoire de l’Eglise nous montre dès l’origine que le plus grand nombre de conversions s’opère par des gens simples : esclaves, artisans, soldats et voyageurs... Faut-il rappeler la parole de saint Paul aux Corinthiens (I, 26-27) : « Il n’y a parmi vous ni beaucoup de sages selon la chair, ni beaucoup de puissants, ni beaucoup de nobles. Mais, ce que le monde tient pour insensé, c’est ce que Dieu a choisi pour confondre les sages ; et ce que le monde tient pour rien, c’est ce que Dieu a choisi pour confondre les forts ; et Dieu a choisi ce qui, dans le monde, est sans considération et sans puissance, ce qui n’est rien, pour réduire au néant ce qui est, afin que nulle chair ne se glorifie devant Dieu » ?
Force redoutable de cette pauvreté, de cette humilité d’esprit qui préserve le savant des pièges de l’orgueil et peut faire de l’ignorant, un apôtre. Au reste, disait le cardinal Pie , « le chrétien le plus illettré possède dans sa foi une dose de philosophie humaine qui n’existe point, au dehors du christianisme, chez ceux de sa condition ». Et le saint curé d’Ars : « Ceux qui sont conduits par le Saint-Esprit ont des idées justes. Voilà pourquoi il y a tant d’ignorants qui en savent plus long que les savants ».
Bienheureux les pauvres en esprit ! En eux est l’espérance, parce qu’eux seuls, aujourd’hui plus que jamais, peuvent se rendre libres. Eux seuls sont susceptibles d’oser répondre pleinement à l’appel de ce « roi temporel » dont parle saint Ignace au début de la « seconde semaine » de ses « Exercices ». Les riches en esprit ont toujours trop de soins, trop de charges, trop de liens, trop d’ « affaires », qui les empêchent de se donner à ce combat. Pour s’en faire des chaînes plus lourdes encore, ils appellent cela leurs devoirs d’état. Tout leur devient, dès lors, prétexte à ne rien faire, sinon à faire peu. »
A suivre : Leçon politique des béatitudes : « BIENHEUREUX, LES DOUX ! BIENHEUREUX LES MISERICORDIEUX ! »
Pour se former et agir à l’école de Jean Ousset, lire « Pour qu’il Règne », ouvrage historique de ceux qui veulent agir « à contre courant » comme nous y invite le Pape François.
Ces publications sont diffusées en collaboration avec Ichtus, organisation héritière de la pensée de Jean Ousset.
Illustration : Giotto, Les stigmates de S. François d’Assise
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