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Après un an au Japon, je suis enfin allé chez un coiffeur, un vrai coiffeur s’entend ; pas ces magasins de coupe rapide à moins de dix euros. Ma mère me disait que le coiffeur ou le salon de coiffure était le lieu idéal pour découvrir un pays. Il eût fallu que j’attende un an pour vérifier ce précepte.
Qui aurait cru qu’un coiffeur puisse révéler tant ce cher Japon, où l’on ne cesse de voir à son insu cette France rêvée mais réelle et aujourd’hui surtout enterrée. Aller à l’autre bout du monde pour retrouver une atmosphère du coiffeur « du coin » que je croyais avoir perdu en quittant mon village. Jamais, depuis lors, je n’avais d’ailleurs trouvé de véritable coiffeur à ma tête. Il a fallu attendre ce petit salon de coiffure japonais qui en plus dépasse de loin ce que l’on peut attendre, habituellement, d’un coiffeur chez nous. Peut-être même que je ne considérerai plus comme une corvée d’aller me faire couper les tiffs, si c’est chez lui.
J’avais déjà été intrigué par ce salon à l’occasion, lorsque passant dans la rue tard dans la soirée, devant la grande vitrine qui laisse tout paraître de ce qui se passe à l’intérieur, je voyais deux hommes assis face à une télévision regardant du sport. "L’ambiance a l’air sympathique, me suis-je dit, familiale".
Il valait le coup de tenter l’aventure : rapide et efficace, je fus rasé à l’ancienne avec ces rasoirs que l’on voit si rarement, les serviettes chaudes et tout le tuuti quanti, du bout du menton jusqu’au front en passant par la nuque, en plus, bien sûr, de l’habituelle coupe. À l’occasion de l’application d’une quelconque lotion fortifiante, petit massage de la tête et même des épaules sur un siège incliné, sans que l’on s’y attende, à l’horizontal. Mais tout cela relève de l’anecdote, et montre surtout l’étrangeté d’éprouver de la nostalgie pour des choses que l’on vit pourtant pour la première fois...
Le point essentiel, le point clef, le point fondamentalement appréciable de ce salon de coiffure, se trouve chez ce coiffeur, avant tout un maître. Il est en effet la troisième génération de coiffeur, formé par son père, lui-même formé par son propre père, avec une histoire de presque 130 ans. Et le second coiffeur de ce salon semble être le fils du père, le prochain héritier. Tout cela raconté par lui avec un grand naturel de normalité en pleine ville de Tôkyô en 2014, et une fierté à peine voilée pour la technique développée à travers les générations. Il est sous-entendu que c’est le rêve de tous que de pouvoir fonder ainsi une maison, une famille, où le métier se transmette de père en fils dans une amélioration progressive des techniques et des œuvres par le génie propre de chacun des membres de la famille, dans l’indépendance assurée et la sérénité gagnée grâce au travail de nos ancêtres et nos efforts continués à travers les générations. Ni besoin de se presser, ni besoin de devenir dépendant par le travail salarié, ni besoin de se vendre. Il suffit simplement d’être bon commerçant.
Est-il encore possible de monter une entreprise familiale sans inquiétude chez nous en France ? Espérons-le. En tout cas, rien n’est plus précieux que de pouvoir transmettre une maison et un art, car le métier transmis s’approche de l’artisanat et dépasse le simple travail pour le sublimer, le patron devenant maître et l’employé apprenti. Le tout protégé par le lien familial qui résiste à tous les égarements de l’homme.
Comment ne pouvons-nous pas y voir la saine influence de la royauté qui conforte et légitime la famille et, bien plus que la simple œuvre de nature, la construction d’une maison centrée sur la famille. Pourquoi donc le saint paternalisme d’autrefois recule-t-il toujours plus au point de devenir invisible dans nos entreprises que l’on appelait autrefois des maisons ? N’est-ce pas tout simplement que depuis trop de temps déjà les Français sont privés de la France, c’est-à-dire du roi ?
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